Le président du Conseil Présidentiel de Transition n’arrive toujours pas à rassembler une majorité pour faire fonctionner l’institution. Lundi, trois conseillers ont boycotté le Conseil des ministres, paralysant une fois de plus les décisions cruciales pour le pays.
Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) vit une nouvelle journée de chaos institutionnel. Ce lundi 23 juin, Fritz Alphonse Jean a essuyé un camouflet retentissant : trois de ses collègues conseillers ont refusé de participer au Conseil des ministres, l’empêchant ainsi d’adopter des décisions importantes, notamment le décret d’application du nouveau Code pénal.
Un boycott qui en dit long
Louis Gérald Gilles, Smith Augustin et Emmanuel Vertilaire ont fait bloc contre leur président. Leur grief ? Fritz Jean aurait voulu imposer unilatéralement l’ordre du jour de la séance, une pratique qu’ils jugent contraire aux règles démocratiques du CPT. Pour ces trois conseillers, c’est une ligne rouge qui ne peut être franchie.
Même le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé a refusé de cautionner cette tentative. Face à l’absence de quorum – il faut au moins cinq conseillers sur sept pour valider les décisions -, le chef du gouvernement a préféré annuler la séance plutôt que de participer à ce qu’il considère comme une mascarade institutionnelle.
Des menaces qui inquiètent
Selon nos informations, Fritz Jean n’a pas bien digéré cet affront. L’ancien gouverneur de la Banque centrale aurait même menacé de « déclarer la guerre » au gouvernement – des propos qui témoignent d’une tension à son paroxysme au sein des institutions.
Pour nos compatriotes qui suivent la politique haïtienne depuis l’étranger, cette situation rappelle tristement les crises institutionnelles que nous avons trop souvent vécues. Comme dirait un proverbe créole : « Nan kay ki gen pwoblèm, moun pa ka dòmi ». Dans une maison en crise, personne ne peut dormir paisiblement.
Le contraste avec Leslie Voltaire
Ce dysfonctionnement tranche avec la période de Leslie Voltaire, prédécesseur de Fritz Jean à la tête du CPT. Voltaire avait su créer un climat de consensus qui permettait au Conseil de fonctionner, même dans un contexte difficile. Son approche inclusive et respectueuse des règles démocratiques avait permis d’assurer une relative stabilité.
En quatre mois de présidence, Fritz Jean n’a réussi à organiser que deux Conseils des ministres. Un bilan désolant qui contraste avec les attentes placées en cet économiste expérimenté.
Un pays qui attend
Pendant que nos dirigeants se disputent dans les bureaux climatisés de Port-au-Prince, la réalité sur le terrain continue de se dégrader. Les gangs étendent leur emprise territoriale. Ce week-end, c’est la commune de La Chapelle, dans l’Artibonite, qui est tombée aux mains des groupes armés.
Nos frères et sœurs de la diaspora, qui envoient des transferts d’argent pour soutenir leurs familles, voient leur pays sombrer un peu plus chaque jour dans l’anarchie. Pendant ce temps, ceux qui sont censés nous diriger se chamaillent pour des questions de procédure.
À un mois de la fin de son mandat, Fritz Jean risque de laisser le souvenir d’une présidence inefficace et divisée. Pendant que le CPT s’enlise dans ses querelles internes, Haïti a besoin de dirigeants capables de mettre l’intérêt national au-dessus de leurs ego. La question se pose : nos institutions sont-elles devenues plus un obstacle qu’une solution pour sortir le pays de la crise ?