Face à l’explosion de la violence des gangs qui contrôlent 90% de Port-au-Prince, Haïti mise sur la formation internationale de ses forces de sécurité. Après le Mexique, la Martinique et bientôt la Colombie, c’est au tour du Brésil d’accueillir 400 policiers haïtiens pour les préparer au combat contre l’insécurité. Une course contre la montre pour sauver un pays à bout de souffle.
Un constat alarmant : 10 000 policiers pour 12 millions d’habitants
Les chiffres donnent le vertige. Fritz Alphonse Jean, président du Conseil présidentiel de transition, ne mâche pas ses mots : avec seulement 10 000 policiers et 1 300 soldats pour protéger près de 12 millions d’Haïtiens, le pays fait face à un défi titanesque.
« Haïti est faible, et nous avons besoin d’une formation spéciale », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse destinée aux médias internationaux lundi 28 juillet. Une faiblesse que les gangs exploitent sans merci, semant la terreur dans un pays où plus de 4 800 personnes ont été tuées entre octobre 2024 et juin 2025.
Le Brésil rejoint la coalition de formation
L’annonce de l’envoi de 400 policiers au Brésil le mois prochain s’inscrit dans une stratégie globale de renforcement des capacités. Au total, 700 membres des forces de sécurité haïtiennes seront formés par des partenaires internationaux dans les prochains mois.
Cette formation brésilienne vient compléter un calendrier déjà chargé. La semaine dernière, 150 soldats haïtiens se sont envolés pour le Mexique. Le 21 juillet, 29 militaires des FADH ont rejoint la Martinique pour s’entraîner avec le 33e RIMa des Forces armées françaises. « Il s’agit de la troisième formation en moins d’un an dans le cadre du partenariat militaire SABRE entre la France et Haïti », précisait l’ambassade de France.
La Colombie en première ligne avec 1000 formations
C’est sans doute l’engagement le plus ambitieux. Le président colombien Gustavo Petro, fidèle à son admiration pour Haïti, a annoncé le 20 juillet que son armée formera 1 000 membres des forces haïtiennes. « L’armée colombienne formera un millier d’hommes de l’armée et de la police haïtiennes. Nous contribuons au sauvetage de la nation qui fut le berceau de la liberté américaine », avait-il déclaré sur X.
Cette générosité colombienne n’est pas un hasard. Petro saisit chaque occasion pour rappeler la dette historique de l’Amérique latine envers Haïti, première nation à abolir l’esclavage et à soutenir les luttes d’indépendance du continent.
Une urgence humanitaire qui ne peut plus attendre
Derrière ces annonces de formation se cache une réalité dramatique. Plus de 1,3 million de personnes ont été déplacées par la violence des gangs ces dernières années. Des dizaines de milliers s’entassent dans des écoles transformées en abris de fortune, dans des conditions inhumaines.
Le gouvernement tente tant bien que mal de distribuer de l’aide financière à ces déplacés, mais les besoins dépassent largement les moyens disponibles. Chaque jour qui passe sans solution sécuritaire aggrave cette crise humanitaire majeure.
Des élections en février 2026 : mission impossible ?
Fritz Alphonse Jean dirige un conseil chargé d’organiser des élections générales d’ici février 2026. Un défi colossal quand on sait que les gangs contrôlent la quasi-totalité de la capitale et s’étendent vers les départements.
« Nous mettons tout en œuvre pour que les élections puissent avoir lieu », assure-t-il, sans vouloir préciser de date exacte. Comment organiser un scrutin crédible quand des millions d’électeurs potentiels vivent sous la terreur ou dans des camps de déplacés ?
L’espoir dans la coopération internationale
Ces formations à l’étranger représentent bien plus qu’un simple renforcement de capacités. Elles symbolisent la solidarité internationale envers un peuple qui a donné l’exemple de la liberté au monde entier il y a plus de 220 ans.
Mexique, Brésil, France, Colombie… Chaque partenaire apporte son expertise pour aider Haïti à retrouver la paix. Mais le défi reste immense : comment 700 policiers et soldats mieux formés pourront-ils faire la différence face à des gangs surarmés et qui recrutent sans cesse ?
La réponse se trouve peut-être dans cette mobilisation internationale sans précédent. Car au-delà des formations, c’est l’espoir d’un peuple tout entier qui se joue dans ces programmes d’entraînement à l’étranger. Un espoir que nos compatriotes en uniformes portent désormais sur leurs épaules, de Mexico à Brasília, de Fort-de-France à Bogotá.