2500 familles aidées, 150 écoles subventionnées, 70 bourses internationales : la directrice générale du Fonds National de l’Éducation dresse un bilan ambitieux de ses premiers mois. Une communication qui tombe à point nommé dans un secteur éducatif en crise profonde.
Six mois après sa prise de fonction le 18 février 2025, Sterline Civil sort de son silence. Dans un rapport publié le 3 août, la directrice générale du Fonds National de l’Éducation (FNE) présente un bilan qui se veut rassurant pour un secteur éducatif haïtien à bout de souffle.
Des chiffres pour rassurer
Les chiffres avancés par Sterline Civil parlent d’eux-mêmes : plus de 2500 familles en difficulté ont bénéficié d’une aide du FNE, ainsi que 150 écoles sélectionnées dans le cadre du Programme d’Appui aux Écoles et Familles en Situation Difficile (PAEF). Un programme qui répond à une urgence sociale criante, notamment à Port-au-Prince où de nombreuses familles peinent à scolariser leurs enfants à cause de l’insécurité et de la crise économique.
Pour les jeunes Haïtiens rêvant d’études supérieures à l’étranger, l’annonce de plus de 70 protocoles d’accords signés pour des études internationales représente un espoir tangible. Ces bourses rappellent l’époque où Haïti envoyait massivement ses étudiants en France, au Canada ou aux États-Unis – une tradition qui avait permis de former l’élite intellectuelle du pays.
Un plan de redressement ambitieux
Face aux critiques récurrentes sur la gestion des fonds publics en Haïti, Sterline Civil mise sur la transparence. La révision des subventions internes, désormais évaluées conjointement avec le Ministère de l’Éducation Nationale, marque une rupture avec les pratiques opaques du passé.
L’institution a également entrepris un vaste programme de formation de son personnel sur des thèmes cruciaux : marchés publics, éthique professionnelle, gestion du stress. Une approche qui tranche avec la culture institutionnelle haïtienne traditionnelle, souvent accusée de négligence et d’improvisation.
La question salariale des enseignants
L’un des défis majeurs reste le paiement régulier des enseignants. Sterline Civil affirme mener un « plaidoyer » auprès du Ministère de l’Éducation pour que les dossiers soient traités rapidement. Une promesse que connaissent bien les instituteurs haïtiens, souvent contraints d’attendre des mois leurs salaires dérisoires.
Cette situation rappelle les grèves d’enseignants qui paralysent régulièrement le secteur éducatif, privant des milliers d’enfants d’école pendant des semaines. Un cercle vicieux que la directrice du FNE semble vouloir briser.
40 projets de réhabilitation en cours
Le FNE annonce également plus de 40 projets de réhabilitation scolaire « partout sur le territoire ». Une ambition louable dans un pays où de nombreuses écoles restent fermées depuis le séisme de 2010 ou ont été détruites par les gangs ces dernières années.
Ces projets de construction et de réhabilitation interviennent alors que des milliers d’enfants haïtiens étudient encore sous des tentes ou dans des bâtiments délabrés, particulièrement dans les zones rurales et les quartiers populaires.
L’argent de « l’espoir collectif »
« L’argent public est l’argent de l’espoir collectif », déclare Sterline Civil dans son rapport. Une formule qui résonne particulièrement dans un pays où la corruption a souvent détourné les fonds destinés à l’éducation, privant des générations entières d’un avenir meilleur.
Cette communication volontariste tranche avec le silence habituel des dirigeants d’institutions publiques haïtiennes. Reste à savoir si ces promesses se traduiront par des résultats concrets sur le terrain.
Après des décennies de dysfonctionnements, le secteur éducatif haïtien peut-il enfin espérer un renouveau ? Le bilan de Sterline Civil au FNE dessine en tout cas une feuille de route ambitieuse. Mais dans un pays où les belles promesses se heurtent souvent à la dure réalité, seuls les faits comptent. Et vous, que pensez-vous de ces annonces ? L’éducation haïtienne est-elle enfin sur la bonne voie ?