Après l’attaque de l’orphelinat Sainte-Hélène et l’enlèvement de neuf personnes, la mort accidentelle de deux agents d’élite plonge cette commune stratégique dans l’incertitude. Les habitants de Fermathe et Thomassin se préparent au pire.
La commune de Kenscoff, perchée dans les hauteurs de Port-au-Prince, vit des heures sombres. Mardi 19 août, deux agents de l’unité d’élite SWAT ont perdu la vie dans des circonstances tragiques à Carrefour Maroca, où se trouve leur base. L’explosion d’un drone serait à l’origine de cette tragédie qui a également blessé cinq autres policiers.
Cette mort accidentelle survient dans un contexte déjà tendu pour cette région qui abrite de nombreux Haïtiens de la classe moyenne et qui était jusqu’ici relativement épargnée par la violence des gangs. Comme le redoute le maire Massillon Jean : « Je crains que cet incident n’affecte le moral des policiers sur le terrain. L’ennemi peut aussi profiter de cette situation pour lancer des attaques. »
L’orphelinat Sainte-Hélène, cible récurrente des bandits
La journée avait déjà mal commencé à Kenscoff. Dès le matin, des bandits armés ont envahi l’orphelinat Sainte-Hélène de l’organisation « Nos Petits frères et sœurs », enlevant au moins deux personnes et volant une ambulance ainsi que des réserves alimentaires.
Cette institution, qui s’occupe d’enfants vulnérables, était déjà dans le viseur des criminels. Le 3 août dernier, neuf personnes y avaient été kidnappées, dont la directrice irlandaise Gena Heraty et un enfant de trois ans. Selon le maire, cinq otages ont été libérés, mais les détails restent flous.
Ces attaques répétées contre un orphelinat illustrent la brutalité sans limite des groupes armés qui terrorisent Haïti, s’en prenant même aux plus vulnérables de la société.
Une population en état d’alerte
Alors que les bandits progressent vers Carrefour Drouet, la panique gagne les communes environnantes. Les habitants de Fermathe, Fort Jacques et Thomassin – des zones résidentielles où vivent de nombreuses familles de la diaspora haïtienne lors de leurs séjours au pays – « se préparent au pire », selon nos sources.
La visite du directeur général de la PNH, Vladimir Paraison, dans la soirée pour « remonter le moral des troupes » témoigne de la gravité de la situation. Cette présence symbolique peut-elle suffire à rassurer des policiers déjà éprouvés par des mois de combat inégal contre des groupes criminels surarmés ?
Un échec sécuritaire qui interpelle
Cette tragédie soulève des questions cruciales sur l’efficacité des forces de sécurité haïtiennes et internationales. Malgré la présence de la PNH, des Forces Armées d’Haïti (FADH) et de la mission kényane, les bandits continuent de progresser et de semer la terreur.
Pour les Haïtiens de l’intérieur comme de la diaspora, Kenscoff représentait l’un des derniers havres de paix relatif près de la capitale. Son basculement dans l’insécurité marque-t-il un nouveau tournant dans la crise haïtienne ? La communauté internationale et les autorités nationales sauront-elles enfin coordonner une réponse à la hauteur de l’urgence ?