Emmanuel Macron a officiellement reconnu « l’État de Palestine » lundi depuis la tribune de l’ONU, entraînant dans son sillage la Belgique, le Luxembourg et d’autres nations européennes. Un mouvement historique qui divise l’Occident et met la pression sur Israël dans un conflit qui a déjà fait plus de 66 000 victimes.
La grand-messe annuelle des Nations unies à New York a pris lundi des allures de révolution diplomatique. En reconnaissant solennellement « l’État de Palestine » depuis la tribune onusienne, Emmanuel Macron a franchi un Rubicon politique qui divise désormais l’Occident et place la France en porte-à-faux avec son allié américain.
« La France reconnaît aujourd’hui l’État de Palestine pour la paix entre le peuple israélien et le peuple palestinien », a déclaré le président français sous un tonnerre d’applaudissements, marquant un tournant historique dans la diplomatie française au Moyen-Orient.
Un front européen uni contre l’isolement américain
L’initiative française a fait boule de neige au sein de l’Union européenne. La Belgique, le Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre ont immédiatement emboîté le pas, rejoignant le mouvement amorcé dimanche par le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et le Portugal.
Cette mobilisation européenne fait écho aux luttes pour la reconnaissance internationale qu’a connues Haïti dans son histoire. Comme la première république noire du monde avait dû attendre des décennies pour voir sa souveraineté reconnue par les grandes puissances, la Palestine voit aujourd’hui ses aspirations légitimées par un nombre croissant d’États.
Désormais, au moins 151 pays sur les 193 États membres de l’ONU reconnaissent l’État palestinien, selon le décompte de l’AFP. Un rapport de force diplomatique qui isole progressivement Israël et ses soutiens traditionnels.
Washington et Tel-Aviv sur la défensive
La réaction américaine ne s’est pas fait attendre. Donald Trump « pense que c’est une récompense pour le Hamas » de reconnaître l’État de Palestine, a fustigé sa porte-parole Karoline Leavitt, illustrant le fossé grandissant entre les États-Unis et leurs alliés européens sur cette question.
Côté israélien, Benjamin Netanyahu a réaffirmé qu’il n’y aurait « pas d’État palestinien » et menacé d’étendre la colonisation en Cisjordanie. Plus radicaux encore, deux ministres d’extrême droite ont appelé à l’annexion pure et simple du territoire palestinien occupé.
Cette escalade verbale rappelle les mécanismes de résistance face aux pressions internationales que connaissent bien les Haïtiens, confrontés depuis des années aux injonctions de la communauté internationale sur leur propre situation politique et sécuritaire.
Des conditions strictes posées par Paris
Macron n’a pas accordé une reconnaissance inconditionnelle. L’établissement d’une ambassade française dans un futur État palestinien reste conditionné à la libération des otages détenus à Gaza par le Hamas. Une position d’équilibre qui témoigne de la complexité du dossier.
Le président palestinien Mahmoud Abbas, privé de visa américain et contraint de s’exprimer par vidéo, a d’ailleurs insisté sur l’engagement palestinien : « Le Hamas n’aura aucun rôle dans le gouvernement, le Hamas et d’autres factions doivent rendre leurs armes à l’Autorité palestinienne. »
Un symbole fort mais aux effets limités
Si ce mouvement de reconnaissance revêt une portée symbolique majeure, ses effets concrets restent limités. Les Palestiniens conservent leur statut d’observateurs à l’ONU, leur adhésion pleine étant bloquée par le veto américain. Une situation qui n’est pas sans rappeler les difficultés d’Haïti à faire entendre sa voix dans les instances internationales malgré sa souveraineté reconnue.
En France, près d’une centaine de villes dirigées par la gauche ont hissé le drapeau palestinien au fronton de leur mairie, témoignant d’un soutien populaire croissant. Un geste symbolique qui résonne avec les nombreuses manifestations de solidarité qu’organise régulièrement la diaspora haïtienne pour soutenir les causes qu’elle juge justes.
L’ombre du « génocide » plane sur les débats
Le contexte de cette reconnaissance diplomatique reste dramatique. Depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, qui a coûté la vie à 1 219 Israéliens, les représailles israéliennes ont fait 65 344 victimes palestiniennes selon Gaza, en majorité des civils.
Des manifestations ont eu lieu lundi à travers l’Italie pour « dénoncer le génocide à Gaza », utilisant un terme qui divise la communauté internationale mais traduit l’émotion suscitée par l’ampleur des destructions dans le territoire palestinien.
L’épreuve de la réalité
Pour l’expert Max Rodenbeck de l’International Crisis Group, ces reconnaissances risquent de « distraire de la réalité, qui est l’effacement accéléré de la vie des Palestiniens sur leur terre natale » sans « mesures concrètes » d’accompagnement.
Un avertissement qui fait écho aux nombreuses déclarations d’intention dont Haïti a fait l’objet sans que les promesses d’aide se concrétisent toujours sur le terrain.
Alors que Benjamin Netanyahu doit s’exprimer vendredi à l’ONU et Donald Trump mardi, cette vague de reconnaissances diplomatiques marquera-t-elle vraiment un tournant dans le conflit israélo-palestinien ? Ou ne restera-t-elle qu’un symbole de plus dans un dossier où les gestes politiques se succèdent sans jamais aboutir à une paix durable ?