Port-au-Prince, 12 février 2025 – Le Bureau des Avocats Internationaux (BAI) fustige l’absence de toute revendication sur la restitution de la rançon de l’indépendance par le président du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), Lesly Voltaire, lors de sa visite officielle en France. L’organisation dénonce une opportunité manquée d’exiger justice pour Haïti face à une dette historique imposée par la France en 1825.
Un silence perçu comme une trahison
Dans un communiqué publié ce mercredi, le BAI s’indigne du fait que Lesly Voltaire n’ait pas évoqué cette question avec le président français Emmanuel Macron. « Le président du CPT n’a même pas abordé la restitution de la rançon de l’indépendance, alors qu’il s’agissait d’un moment clé pour poser cette revendication historique », déclare le bureau dirigé par Me Mario Joseph.
L’organisation rappelle que la France avait exigé de Haïti une indemnité de 150 millions de francs-or en 1825, sous la menace d’une nouvelle invasion militaire, une somme qui, une fois ajustée avec les intérêts, représenterait aujourd’hui environ 115 milliards de dollars. Ce tribut, versé pendant plus d’un siècle, a lourdement entravé le développement économique d’Haïti et reste une plaie ouverte dans les relations franco-haïtiennes.
Une revendication historique étouffée
Le BAI souligne également que cette revendication n’est pas nouvelle. En 2003, sous la présidence de Jean-Bertrand Aristide, Haïti avait officiellement exigé de la France la restitution de 21 milliards de dollars correspondant aux paiements effectués par l’État haïtien. Cette initiative avait été brutalement interrompue après l’exil forcé du président Aristide en 2004, un événement que le BAI considère comme le résultat d’un « accord tacite entre la France et les États-Unis pour enterrer cette demande ».
Une attitude jugée indigne
Le BAI accuse Lesly Voltaire d’avoir fait preuve d’un manque de courage politique en ignorant ce dossier lors de son déplacement en France le 28 janvier 2025. « Plutôt que de porter haut la voix du peuple haïtien pour exiger justice, il a préféré quémander une aide alimentaire, troquant notre dignité historique contre quelques sacs de riz », s’indigne le bureau d’avocats.
Cette posture est jugée « inacceptable » à l’approche du bicentenaire de cette dette imposée, qui sera commémoré le 17 avril 2025. Plusieurs organisations militantes, dont le BAI, prévoient déjà de faire pression sur la communauté internationale pour relancer le débat autour des réparations et de la restitution de cette rançon.
Un combat qui se poursuit
La question des réparations liées à l’esclavage et aux dettes imposées aux anciennes colonies a récemment refait surface sur la scène internationale. Lors du Forum Permanent des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine, tenu à Genève en avril 2024, des organisations de défense des droits humains ont rappelé que l’esclavage est reconnu comme un crime contre l’humanité et que la France a une responsabilité historique à assumer.
Face à ce silence jugé coupable, le BAI en appelle à la mobilisation de la société civile haïtienne et à une pression continue sur les autorités de transition pour qu’Haïti ne renonce pas à son droit à réparation. « Lesly Voltaire avait une responsabilité historique. En choisissant de garder le silence, il a trahi le combat du peuple haïtien », conclut l’organisation.