Ouanaminthe : le commissariat attaqué par des agents de la BSAP après l’arrestation d’un des leurs
Ouanaminthe, 21 avril 2025 — Une vive tension a secoué la ville frontalière de Ouanaminthe ce dimanche 20 avril, lorsqu’une attaque armée a été perpétrée contre le commissariat local par des membres de la Brigade de sécurité des aires protégées (BSAP). L’action, qualifiée de représailles, fait suite à l’arrestation d’un agent de la BSAP par des policiers de l’unité Polifront, exécutant un mandat émis par un juge d’instruction.
Selon les autorités policières, plusieurs agents de la BSAP affectés à Ouanaminthe ont ouvert le feu sur le commissariat dans un acte d’escalade sans précédent. L’échange de tirs a blessé légèrement l’un des assaillants, a confirmé le commissaire divisionnaire Jacques Antoine Étienne, directeur départemental du Nord-Est de la Police nationale d’Haïti (PNH).
« Oui, des agents de la BSAP ont effectivement attaqué le commissariat. Ils protestaient contre l’arrestation de l’un de leurs collègues. Les policiers ont réagi avec fermeté. Un agent de la BSAP a été blessé au cours de l’affrontement », a déclaré le commissaire Étienne.
Il a également révélé qu’un des agents de la BSAP avait ouvert le feu sur le policier Junior Rhiolcé, membre de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC), qui a miraculeusement échappé à cette tentative de meurtre.
Un climat de tension préoccupant
Le chef de la police régionale indique avoir immédiatement informé le commissaire du gouvernement, Me Éno Zéphirin, et le délégué départemental Dionel Germain. Dans la foulée, le commissaire municipal de Ouanaminthe, Ronald Eugène, a entamé des discussions avec les responsables locaux de la BSAP afin de désamorcer la crise et éviter une escalade de la violence.
L’agent interpellé, dont l’identité n’a pas été révélée, est accusé de tentative d’assassinat et d’association de malfaiteurs. Il est actuellement détenu à Fort-Liberté, au siège départemental de la PNH, en attendant la suite de la procédure judiciaire.
Une attaque symptomatique d’un dysfonctionnement plus large
Cet incident soulève des interrogations profondes sur le fonctionnement des forces de sécurité en Haïti. La BSAP, initialement conçue pour protéger les aires écologiques sensibles, semble avoir dévié de sa mission en devenant un acteur armé non soumis au contrôle direct de la PNH. Cette attaque met en lumière la fracture sécuritaire croissante entre institutions de l’État et forces paraétatiques, notamment dans les zones frontalières.
Des citoyens présents lors de l’attaque ont exprimé leur inquiétude face à la montée en puissance de structures armées opérant avec une autonomie inquiétante. « On ne sait plus qui est qui. On est en danger même quand il s’agit d’agents supposés défendre l’ordre », a confié un habitant, encore choqué par les tirs nourris qui ont résonné près du commissariat.
Alors que les autorités tentent de calmer la situation, cet affrontement entre deux corps censés œuvrer pour la sécurité nationale remet en question l’unicité du commandement et l’efficacité de l’action de l’État dans certaines régions du pays.
L’évolution de ce dossier sera suivie de près, tant par les instances nationales que par les observateurs internationaux préoccupés par la sécurité et la gouvernance en Haïti.