Face à la recrudescence des abus contre les femmes haïtiennes enceintes en République Dominicaine, le gouvernement haïtien sort de sa réserve diplomatique et mobilise tous ses moyens pour défendre ses citoyennes les plus vulnérables.
Les images sont insoutenables, les témoignages glaçants. Une fois de plus, des femmes haïtiennes enceintes subissent des traitements dégradants de l’autre côté de la frontière. Cette fois-ci, le gouvernement haïtien ne compte pas laisser passer. Dans un communiqué au ton inhabituellement ferme publié mercredi, le Ministère des Affaires Étrangères (MAE) hausse le ton et annonce une série de mesures diplomatiques pour protéger ses concitoyennes.
Quand la diplomatie sort de sa zone de confort
Le ministre Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste ne mâche plus ses mots. Sous les instructions directes du Conseil Présidentiel de Transition et du Chef de Gouvernement, il a ordonné une riposte diplomatique coordonnée qui marque une rupture avec la traditionnelle retenue haïtienne face aux exactions dominicaines.
L’ambassadeur Fritz Longchamps reçoit pour mission d’intensifier la présence diplomatique dans les zones sensibles de Dajabón et Fruisa, ces points névralgiques où se concentrent tensions et violations des droits humains. Sa mission : organiser des rapatriements volontaires dignes et exiger des enquêtes rigoureuses sur chaque violation recensée.
Cette fermeté nouvelle résonne particulièrement dans la diaspora haïtienne, notamment aux États-Unis et au Canada, où de nombreuses familles gardent des liens étroits avec des proches restés en République Dominicaine. Pour elles, cette prise de position gouvernementale représente enfin une reconnaissance officielle de souffrances trop longtemps ignorées.
Un cri du cœur qui mobilise la société civile
L’émotion dépasse les cercles officiels. Ce vendredi 23 mai, un sit-in symbolique est prévu devant les locaux du MAE, organisé par plusieurs organisations de la société civile haïtienne. Cette mobilisation spontanée illustre l’exaspération d’une population qui ne supporte plus de voir ses femmes, particulièrement les plus vulnérables, subir de telles humiliations.
« C’est dans l’unité et la solidarité que nous ferons respecter les droits et la dignité de nos concitoyens », martèle le communiqué ministériel. Des mots qui prennent une résonance particulière quand on sait que derrière chaque statistique se cache le visage d’une mère, d’une sœur, d’une fille.
Au-delà des frontières, une solidarité qui s’organise
Cette crise révèle aussi la force du réseau de solidarité haïtien à travers le monde. De Boston à Paris, en passant par Montréal et Miami, les associations haïtiennes se mobilisent pour faire entendre leur voix et soutenir l’action diplomatique de Port-au-Prince.
Le MAE ne s’y trompe pas et lance un appel direct aux organismes internationaux de droits humains pour qu’ils se joignent à cette lutte. Une stratégie qui vise à internationaliser le débat et à faire pression sur les autorités dominicaines par tous les canaux possibles.
L’heure de vérité pour la diplomatie haïtienne
Cette affaire teste la capacité du gouvernement haïtien à défendre efficacement ses citoyens à l’étranger. Longtemps critiquée pour sa passivité face aux exactions anti-haïtiennes en République Dominicaine, la diplomatie haïtienne semble aujourd’hui décidée à changer de méthode.
Reste à voir si cette fermeté nouvelle portera ses fruits. Car au-delà des communiqués et des protestations diplomatiques, ce sont des vies humaines qui sont en jeu. Des femmes qui portent la vie et qui méritent respect et dignité, où qu’elles se trouvent sur cette île que nous partageons. L’avenir dira si cette mobilisation sans précédent parviendra à faire cesser ces abus et à restaurer un minimum de décence dans les relations entre les deux peuples d’Hispaniola.