L’administration Trump frappe fort en annulant le programme d’accueil humanitaire qui avait permis à des milliers de familles haïtiennes de fuir la violence des gangs. Une décision qui sème l’angoisse dans la diaspora alors qu’Haïti sombre dans le chaos.
L’ultimatum de Washington
Le couperet est tombé ce jeudi 12 juin. Le département de la Sécurité intérieure américain (DHS) a commencé à envoyer des emails aux bénéficiaires du programme humanitaire mis en place sous Biden, leur ordonnant purement et simplement de quitter le territoire américain. Parmi eux, plus de 200 000 ressortissants haïtiens qui avaient trouvé refuge aux États-Unis grâce à ce dispositif d’urgence.
« Si vous n’avez pas obtenu un statut légal vous permettant de rester aux États-Unis, vous devez partir immédiatement », stipule le message du DHS. Une formulation qui ne laisse aucune place à l’ambiguïté.
Le programme CHNV (Cubains, Haïtiens, Nicaraguayens, Vénézuéliens), lancé en 2022 face à la crise migratoire, permettait aux ressortissants de ces quatre pays de rejoindre les États-Unis s’ils disposaient d’un parrain américain. Une bouée de sauvetage pour des milliers de familles haïtiennes fuyant l’enfer des gangs.
Une politique du retour à « l’Amérique d’abord »
L’administration Trump ne mâche pas ses mots pour justifier cette décision radicale. « L’administration Biden a menti à l’Amérique », accuse Tricia McLaughlin, secrétaire adjointe, qui dénonce l’entrée de « plus d’un demi-million d’étrangers mal contrôlés » sur le territoire américain.
Pour encourager les départs « volontaires », Washington propose même une prime : 1 000 dollars et une aide au voyage pour ceux qui acceptent de s’auto-expulser via l’application mobile CBP Home. Une carotte qui peine à masquer le bâton de la politique migratoire trumpiste.
Haïti, un pays en perdition
Cette décision tombe au pire moment pour Haïti. Le pays traverse la crise la plus grave de son histoire moderne. Selon l’ONU, plus de 5 000 personnes ont été tuées en 2024, tandis qu’un million d’Haïtiens sont déplacés à l’intérieur du pays à cause de la violence des gangs.
La situation est si critique que depuis novembre 2024, aucun vol commercial américain n’atterrit plus à l’aéroport Toussaint Louverture de Port-au-Prince. En mai dernier, Washington a même classé les coalitions Viv Ansanm et Gran Grif comme organisations terroristes internationales, reconnaissant officiellement que ces gangs contrôlent désormais l’Ouest et l’Artibonite, les deux départements les plus peuplés du pays.
L’angoisse de la diaspora
Pour les familles haïtiennes établies aux États-Unis – que ce soit à Miami, New York, Boston ou Montréal -, cette annonce sonne comme un coup de tonnerre. Comment renvoyer des gens vers un pays où règne la terreur ? Comment séparer à nouveau des familles qui venaient de se retrouver ?
Beaucoup de ces bénéficiaires ont reconstruit leur vie, trouvé du travail, scolarisé leurs enfants. Ils contribuent à l’économie américaine tout en envoyant des transferts d’argent vitaux pour leurs proches restés au pays.
Cette décision révèle une fois de plus la fragilité du statut des migrants haïtiens, ballottés entre les changements de politique américaine et l’instabilité chronique de leur pays natal. Reste à savoir si la communauté internationale trouvera d’autres solutions pour ces milliers de familles prises entre deux feux.