Après la classification de « Viv ansanm » et « Baz Gran grif » comme organisations terroristes par les États-Unis, la Banque centrale haïtienne ordonne aux institutions financières de redoubler de vigilance pour empêcher tout financement de ces groupes armés.
Face à l’escalade de la violence des gangs en Haïti, la Banque de la République d’Haïti (BRH) hausse le ton. Dans un avis publié le 29 juillet 2025, l’institution monétaire exige des banques et autres établissements financiers qu’ils renforcent drastiquement leurs contrôles pour détecter toute tentative d’utilisation du système bancaire par les groupes armés récemment classés comme « organisations terroristes ».
Cette mesure fait suite à la décision historique prise le 2 mai dernier par l’administration américaine, qui a officiellement désigné les coalitions « Viv ansanm » et « Baz Gran grif » comme organisations terroristes étrangères. Une première dans l’histoire récente d’Haïti qui change complètement la donne pour ces groupes criminels et leurs complices.
Des contrôles bancaires renforcés sur tout le territoire
La BRH ne plaisante pas avec ces nouvelles directives. Chaque banque, coopérative de crédit et institution de microfinance doit désormais mettre en place une surveillance accrue de toutes les transactions financières. Concrètement, cela signifie que vos virements, retraits ou dépôts pourraient faire l’objet de vérifications plus poussées, surtout s’ils présentent des caractéristiques suspectes.
Les établissements financiers devront particulièrement surveiller les « transferts inhabituels ou structurés », les « comptes récemment ouverts dans des régions à haut risque » et les « changements de bénéficiaires effectifs ». Pour nos compatriotes de la diaspora qui envoient régulièrement de l’argent au pays, ces mesures pourraient se traduire par des délais supplémentaires ou des questions plus détaillées sur l’origine et la destination des fonds.
Une chasse aux complices et intermédiaires
Mais la BRH va plus loin. Elle exige que les banques identifient non seulement les membres directs de ces gangs, mais aussi tous les « intermédiaires ou facilitateurs potentiels » qui pourraient les aider à accéder au système financier. Cette approche vise à couper définitivement les gangs de leurs sources de financement, qu’elles proviennent des kidnappings, du trafic de drogue ou d’autres activités criminelles.
Les institutions devront effectuer des « recherches en ligne ciblées », vérifier les « médias négatifs » et même mener des « recherches hors ligne » incluant la consultation de documents publics et le contact avec des sources institutionnelles. Une véritable enquête policière financière à chaque transaction suspecte.
Marco Rubio annonce « la fin de l’impunité »
Cette offensive financière s’inscrit dans une stratégie plus large des États-Unis contre l’insécurité en Haïti. Le secrétaire d’État Marco Rubio a été clair dans son message : « L’ère de l’impunité pour ceux qui soutiennent la violence en Haïti est révolue. »
Désormais, toute personne ou entité qui fournit un soutien à « Viv ansanm » ou « Gran grif » risque des poursuites aux États-Unis et peut se voir interdire l’entrée sur le territoire américain. Pour nos compatriotes qui vivent aux États-Unis ou espèrent s’y rendre, le message est sans équivoque : toute connexion, même indirecte, avec ces groupes peut avoir des conséquences dramatiques sur leur statut migratoire.
Un tournant décisif dans la lutte antigang ?
Ces mesures marquent-elles enfin le début de la fin pour les gangs qui terrorisent la population haïtienne depuis des années ? L’efficacité dépendra largement de l’application rigoureuse de ces directives par les institutions financières locales et de la coopération internationale.
Pour les Haïtiens ordinaires, ces contrôles renforcés pourraient certes compliquer certaines transactions, mais ils représentent aussi un espoir : celui de voir enfin les gangs perdre leur capacité de nuire en étant coupés de leurs sources de financement. Car comme le dit si bien le proverbe créole : « Se nan dlo mouton ap nwaye » – c’est dans l’eau que le mouton se noie. Sans argent, même les gangs les plus puissants finiront par s’assécher.