Élie Limarge, propriétaire du « Beau Rivage Hôtel » à Gros-Morne, a été retrouvé mort après une semaine de séquestration par le gang « Kokorat san ras ». Malgré le versement partiel d’une rançon de 300 000 dollars américains, les ravisseurs ont exécuté froidement cet entrepreneur qui symbolisait l’espoir dans une région déjà meurtrie. Son assassinat illustre tragiquement l’effondrement sécuritaire qui gangrène l’Artibonite et le Centre.

Un crime qui brise le cœur de Gros-Morne

Le 9 juin 2025 restera gravé dans la mémoire collective de Gros-Morne comme un jour de deuil national. Élie Limarge, figure respectée du milieu entrepreneurial local, n’est plus. Son corps sans vie, retrouvé abandonné à Morne Marguerite, raconte l’histoire d’un pays où investir devient un acte de bravoure qui peut coûter la vie.

Ancien résident du Canada selon certaines sources, Élie Limarge avait choisi de croire en Haïti. Son établissement, « Le Beau Rivage Hôtel », témoignait de cette foi en l’avenir du pays. Une foi qui lui a été fatale.

Enlevé au centre-ville de Gros-Morne par des membres armés du gang « Kokorat san ras », dirigé par un certain Meyer et opérant depuis Ti Bois d’Homme, l’hôtelier a vécu un calvaire d’une semaine. Ses ravisseurs exigeaient 300 000 dollars américains plus deux véhicules – une somme astronomique qui en dit long sur l’audace criminelle des gangs.

Quand payer ne suffit plus à sauver des vies

L’aspect le plus révoltant de cette tragédie ? La famille et les proches d’Élie Limarge ont réussi l’impossible : rassembler une partie de cette rançon colossale. Ils ont payé, espérant racheter une vie. Mais les criminels ont trahi leur propre « code » – si tant est qu’il en existe un dans cet univers de barbarie.

Cette exécution après paiement marque un nouveau palier dans l’horreur. Elle envoie un message glacial : désormais, même céder aux exigences des ravisseurs ne garantit plus rien. C’est la mort programmée de toute négociation, de tout espoir de survie pour les futures victimes.

Pendant ce temps, deux autres otages croupissent encore entre les mains du gang, leurs familles vivant un cauchemar sans fin.

Le cri de détresse d’un maire impuissant

Hubert Cénac, maire de Gros-Morne, n’a pas pu contenir son émotion sur les ondes de Radio Télé Caraïbes : « C’est un crime de trop. Nous vivons dans la peur. L’État doit agir. Les habitants de Gros-Morne méritent de vivre en paix. »

Ces mots résonnent comme un SOS lancé dans le vide. Car que peut faire un édile municipal face à des gangs lourdement armés quand l’État central brille par son absence ? Le maire de Gros-Morne rejoint ainsi le chœur des élus locaux abandonnés à leur sort, spectateurs impuissants de la destruction de leurs communes.

L’Artibonite et le Centre : Territoires abandonnés

L’assassinat d’Élie Limarge n’est malheureusement qu’un épisode de plus dans l’effondrement sécuritaire de ces deux départements stratégiques. À Petite-Rivière de l’Artibonite, le gang « Grif » continue de terroriser Savien, défiant même la présence des forces kényanes venues en renfort.

Plus au sud, Mirebalais et Saut-d’Eau vivent un siège permanent depuis le 31 mars, orchestré par les gangs de la coalition « Viv Ansanm ». Résultat : plus de 50 000 personnes déplacées, des familles entières qui fuient l’horreur quotidienne.

Cette expansion territoriale des gangs dessine une carte de l’horreur qui s’étend inexorablement. Aujourd’hui Gros-Morne, demain quelle autre commune tombera ?

Quand l’espoir entrepreneurial se meurt

Au-delà du drame humain, la mort d’Élie Limarge symbolise l’assassinat de l’espoir entrepreneurial en Haïti. Qui osera encore investir, créer des emplois, développer le tourisme local quand les criminels ciblent spécifiquement ceux qui réussissent ?

Ce n’est pas seulement un hôtelier qui est mort à Gros-Morne, c’est une partie du rêve haïtien qui s’éteint avec lui. Chaque entrepreneur assassiné, c’est un pan de l’économie locale qui s’effondre, des emplois qui disparaissent, des familles qui sombrent dans la précarité.


Élie Limarge voulait croire en Haïti. Haïti l’a tué. Cette équation tragique résume l’état du pays aujourd’hui. Tant que l’État restera absent, tant que les gangs dicteront leur loi, d’autres Élie Limarge mourront. Et avec eux, c’est l’âme même de la nation qui se vide de son sang. Gros-Morne pleure aujourd’hui. Demain, quelle commune sera en deuil ?

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