Le nouveau Secrétaire général de l’Organisation des États américains, Albert Ramdin, évoque la possibilité d’un dialogue avec les gangs haïtiens pour sortir le pays de la crise. Une approche controversée qui suscite déjà des débats alors que la sécurité reste le nerf de la guerre.
Dans une déclaration qui ne manquera pas de faire couler beaucoup d’encre, Albert Ramdin, fraîchement installé comme Secrétaire général de l’OEA depuis le 30 mai dernier, a ouvert la porte à une approche inédite pour résoudre la crise haïtienne. Lors d’un entretien accordé lundi 9 juin à The Dialogue, il n’a pas exclu la possibilité de négocier avec les gangs qui tiennent Port-au-Prince en otage.
Une stratégie à double voie face à l’insécurité
« Nous devons examiner si, d’une manière différente, nous pouvons gérer le contexte sécuritaire », a expliqué Ramdin. Pour lui, deux options s’offrent à la communauté internationale : d’un côté, poursuivre la lutte armée contre les gangs, de l’autre, « tenter de pénétrer les gangs et leurs dirigeants », éventuellement par procuration.
Cette proposition arrive à un moment critique où les Nations Unies estiment que les gangs contrôlent jusqu’à 90% de la capitale haïtienne. Une réalité que connaissent bien les familles haïtiennes, qu’elles vivent à Delmas, Pétion-Ville ou même à Brooklyn ou Miami, qui voient leurs proches contraints de vivre sous la terreur quotidienne des groupes armés.
« Nous devons trouver un moyen de ramener les gangs à la normale », a déclaré le nouveau patron de l’OEA, tout en précisant qu’il fallait d’abord écouter les États membres avant d’aller plus loin dans cette direction.
Un calendrier politique sous pression
Les enjeux sont énormes. Ramdin mise sur l’organisation d’un référendum constitutionnel et le maintien des élections nationales prévues pour le 15 novembre. Mais tout dépend de la sécurité, qu’il qualifie de « haute priorité ». Le compte à rebours a commencé : le mandat du Conseil présidentiel de transition expire en février prochain.
Les premières discussions sur cette nouvelle feuille de route politique se dérouleront probablement en marge de l’Assemblée générale de l’OEA, prévue du 25 au 27 juin à Antigua-et-Barbuda. Un rendez-vous crucial pour l’avenir d’Haïti.
L’aide humanitaire bloquée par les gangs
Le Secrétaire général a également pointé du doigt un problème concret qui touche directement la population : « Une aide humanitaire significative en Haïti ne peut être apportée maintenant simplement parce que les gangs contrôlent les ports. » Une situation qui rappelle douloureusement aux Haïtiens d’ici et d’ailleurs les difficultés à faire parvenir de l’aide à leurs familles restées au pays.
Une approche controversée
Cette ouverture au dialogue avec les gangs marque un tournant radical, surtout quand on sait que les États-Unis ont récemment classé la coalition criminelle « Viv Ansanm » et « Gran Grif » comme organisations terroristes étrangères. Comment concilier négociation et fermeté face au terrorisme ? La question divise déjà.
« Personnellement, je pense que si nous ne réussissons pas en Haïti, nous manquerons notre objectif de démocratie, de paix et de prospérité », a conclu Albert Ramdin. Une déclaration qui résonne comme un aveu : l’échec en Haïti serait celui de toute la région. Reste à savoir si cette nouvelle approche, aussi controversée soit-elle, pourra enfin apporter la paix tant attendue par le peuple haïtien. Qu’en pensez-vous ? Faut-il parfois négocier avec ses ennemis pour sauver des vies ?