En août 2025, la République Dominicaine a rapatrié ou refoulé plus de 26 900 Haïtiens, dont des femmes enceintes, des mères allaitantes et des mineurs non accompagnés. Le Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR) dénonce des violations graves des droits humains et des actes de violence à l’encontre des migrants haïtiens.

Port-au-Prince, 6 octobre 2025 – Les chiffres font froid dans le dos. Du 1er au 30 août 2025, pas moins de 26 968 Haïtiens ont été rapatriés de la République Dominicaine, selon un rapport du Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR). À ces déportations s’ajoutent 25 332 retours dits « spontanés » et 9 394 refoulements, illustrant l’ampleur d’une crise humanitaire qui ne cesse de s’aggraver.

Parmi les personnes renvoyées en Haïti figurent des cas particulièrement préoccupants : 113 femmes enceintes, 399 femmes allaitantes, 159 personnes en situation de handicap et 869 mineurs non accompagnés. Des profils vulnérables qui, selon le GARR, auraient dû bénéficier d’une protection humanitaire minimale.

Des déportations en provenance de plusieurs pays

Si la République Dominicaine reste de loin le principal pays d’expulsion, elle n’est pas la seule destination d’où les Haïtiens sont rapatriés. Durant le même mois d’août, 23 compatriotes ont été renvoyés des Bahamas, 206 des îles Turques-et-Caïques, et 90 autres des États-Unis.

Ces chiffres témoignent d’une réalité amère pour des milliers de familles haïtiennes qui, fuyant l’insécurité et la misère, se retrouvent prises au piège entre un pays qu’elles ont quitté par désespoir et des nations voisines qui les rejettent sans ménagement.

À Belladère, le GARR mobilisé pour accueillir les rapatriés

Face à cet afflux massif, le GARR a intensifié ses opérations d’accueil à Belladère, l’un des principaux points d’entrée des rapatriés en provenance de la République Dominicaine. Entre le 1er et le 31 août, l’organisation a accueilli et assisté 1 155 migrants déportés, dont 387 femmes, 168 filles, 159 garçons et 441 hommes.

Parmi eux, 68 mères allaitantes, 3 enfants non accompagnés, 15 personnes en situation de handicap, ainsi que 39 femmes et adolescentes enceintes. Ces personnes ont bénéficié de kits d’hygiène, de nourriture, d’hébergement temporaire, et de soutien psychologique et médical. Un accompagnement indispensable pour des individus souvent traumatisés par leur expérience.

Violences et persécutions : le calvaire des femmes enceintes

Le GARR ne s’est pas contenté de dresser des statistiques. Dans son rapport, l’organisation dénonce avec véhémence les actes de violence auxquels sont confrontées les femmes haïtiennes enceintes en République Dominicaine.

« Des femmes migrantes haïtiennes enceintes continuent d’être persécutées, chassées des hôpitaux sans aucune considération humanitaire, sans le moindre respect de leurs droits fondamentaux en République Dominicaine », affirme le GARR.

Pour échapper à ces persécutions, de nombreuses femmes ont été contraintes de se confiner chez elles, même lorsqu’elles avaient un besoin urgent de soins de santé. Une situation dramatique qui met en danger leur vie et celle de leur bébé.

Le ministre dominicain de la Santé sous le feu des critiques

Le GARR a également qualifié de « regrettables » les déclarations du ministre de la Santé dominicain, Victor Atallah, qui s’est « enorgueilli » de la réduction de la fréquentation des centres hospitaliers de Santiago par les femmes migrantes haïtiennes enceintes, passée de 30 % à 60 % ces derniers mois.

Pour le GARR, cette baisse n’est pas le signe d’une politique migratoire réussie, mais bien la preuve d’un climat de peur et de répression qui empêche les femmes enceintes d’accéder aux soins de santé de base. Une situation qui a déjà fait des victimes, selon l’organisation.

Une politique de déportation qui s’intensifie

Depuis plusieurs années, la République Dominicaine a intensifié les déportations d’Haïtiens en situation irrégulière sur son territoire. Cette politique s’accompagne de témoignages récurrents de violences, notamment sexuelles, perpétrées par des agents de la Direction Générale de Migration dominicaine.

Ces faits ont été rapportés à plusieurs reprises par des médias étrangers et par le GARR lui-même. Ni les femmes enceintes, ni les mères allaitantes ne sont épargnées. Certaines ont été chassées des hôpitaux où elles cherchaient à accoucher dans des conditions dignes.

Un appel à la solidarité et à l’action

Pour les Haïtiens vivant en Haïti comme ceux de la diaspora établis à Miami, New York, Montréal ou Paris, ces chiffres rappellent une réalité douloureuse : la condition de migrant haïtien reste synonyme de précarité et de vulnérabilité extrême.

Le GARR appelle la communauté internationale et les autorités haïtiennes à réagir fermement face à ces violations des droits humains. Mais au-delà des dénonciations, c’est toute une réflexion sur les causes profondes de l’émigration haïtienne qui doit être menée.

Tant que l’insécurité, la pauvreté et l’absence d’opportunités continueront de pousser les Haïtiens sur les routes de l’exil, ces drames humains se répéteront. Les 26 900 rapatriés du mois d’août ne sont pas qu’une statistique : ce sont des vies brisées, des familles séparées, des rêves anéantis. Et derrière chaque chiffre se cache une histoire tragique qui mérite d’être entendue.

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