Convoquée à la Primature pour justifier son absence aux cérémonies officielles du drapeau, la ministre Niola Lynn Sarah Dévalis Octavius devra également rendre compte d’un budget de 400 millions de gourdes jugé excessif par de nombreux Haïtiens. Enquête sur cette polémique qui enflamme les réseaux sociaux.
Une absence qui fait grand bruit
À quelques jours des festivités nationales du 18 mai, la controverse enfle autour de l’organisation des célébrations du 222e anniversaire de notre drapeau national. La ministre de la Jeunesse, des Sports et de l’Action Civique, Niola Lynn Sarah Dévalis Octavius, se trouve au cœur d’une tempête médiatique suite à son absence remarquée lors des cérémonies officielles qui se sont déroulées au Cap-Haïtien le mois dernier.
Cette absence est d’autant plus incompréhensible que la ministre avait été désignée coordinatrice principale des festivités du drapeau. Lors d’une conférence de presse tenue à la Primature en amont de l’événement, elle avait présenté avec assurance les grandes lignes des initiatives prévues, annonçant un budget conséquent de 400 millions de gourdes pour marquer dignement cette date symbolique.
De sources bien informées, nous apprenons que la ministre a été convoquée à la Primature pour s’expliquer sur cette défection inexpliquée. Une absence d’autant plus remarquée que le ministre de l’Éducation Nationale, également impliqué dans l’organisation des festivités, était bien présent lors des cérémonies.
Un budget qui suscite l’indignation
Dans un pays où plus de 60% de la population vit sous le seuil de pauvreté, l’annonce d’un budget de 400 millions de gourdes (environ 2,8 millions de dollars américains) pour les festivités du drapeau a suscité de vives réactions dans l’opinion publique.
« Avec les défis économiques que confronte notre diaspora et nos familles au pays, comment justifier une telle dépense pour des festivités d’une journée? » s’interroge Marie-Claude Dorsinville, membre de l’Association des Haïtiens de Montréal. Dans les rues de Port-au-Prince et sur les réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui affirment n’avoir perçu aucune amélioration notable dans l’organisation des célébrations, malgré l’ampleur du budget annoncé.
« Chaque année, c’est la même chose. On nous parle de millions, mais on ne voit pas où va cet argent, » déplore Jean-Robert, petit commerçant au marché de la Croix-des-Bossales. Un sentiment partagé par de nombreux Haïtiens qui réclament plus de transparence dans la gestion des fonds publics.
Une situation qui rappelle des précédents
Cette polémique rappelle d’autres controverses similaires qui ont émaillé la vie politique haïtienne ces dernières années. En 2022, le ministère du Tourisme avait également fait l’objet de critiques pour la gestion opaque des fonds alloués au Carnaval national.
Pour Roosevelt Jean-Baptiste, analyste politique et professeur à l’Université d’État d’Haïti, « cette situation illustre parfaitement les défis de gouvernance auxquels fait face notre pays. La redevabilité des officiels envers le peuple haïtien ne devrait pas être négociable, qu’ils soient en Haïti ou représentant nos intérêts à l’étranger. »
Un ministère sous pression
Jusqu’à présent, ni la ministre ni son cabinet n’ont fourni d’explication officielle concernant cette absence remarquée. Ce silence prolongé ne fait qu’alimenter les spéculations et renforcer les soupçons de malversation.
Plusieurs organisations de la société civile, dont le RNDDH (Réseau National de Défense des Droits Humains), ont appelé à une enquête approfondie sur l’utilisation des fonds alloués aux célébrations du drapeau. Certains députés ont également annoncé leur intention de convoquer la ministre devant la Commission des Sports et de la Jeunesse du Parlement pour qu’elle s’explique sur cette gestion controversée.
Et maintenant?
Alors que nous nous approchons des prochaines célébrations du 18 mai, cette affaire soulève d’importantes questions sur la gestion des fonds publics et la responsabilité des hauts fonctionnaires envers les citoyens haïtiens.
Pour nos compatriotes de la diaspora qui contribuent significativement à l’économie nationale par leurs transferts de fonds, et pour ceux qui luttent quotidiennement contre les difficultés économiques en Haïti, cette polémique résonne comme un symbole des défis de gouvernance qui persistent dans notre pays.
Le drapeau haïtien, symbole d’unité et de fierté nationale né de la lutte pour notre indépendance, mérite certainement mieux qu’une célébration entachée par la controverse. À l’approche des festivités de cette année, les Haïtiens attendent des explications claires et une meilleure utilisation des ressources du pays.
