Une première promotion de professionnels en marchés publics vient d’être diplômée après deux mois de formation intensive. Un signal fort dans un pays où la gestion des fonds publics fait souvent débat. Ces nouveaux experts pourront-ils vraiment changer la donne ?

C’est un petit pas vers la transparence qui pourrait avoir de grandes conséquences. Mercredi 3 juillet, 150 professionnels ont reçu leur certification en marchés publics à l’hôtel Montana, marquant la fin d’une formation de deux mois organisée par la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP). Une initiative qui arrive à point nommé dans un contexte où la question de la bonne gouvernance préoccupe autant les Haïtiens du pays que ceux de la diaspora.

Un partenariat de poids pour une formation d’envergure

Cette formation, lancée le 28 avril dernier, n’est pas le fruit du hasard. Elle résulte d’un partenariat stratégique entre la CNMP, l’Université d’État d’Haïti (UEH), SETYM International et l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal. Le tout financé par la Banque Interaméricaine de Développement (BID), preuve que la communauté internationale mise sur cette approche pour améliorer la gouvernance en Haïti.

Les 150 agents, issus de différentes structures publiques, ont été encadrés par 33 formateurs dans un programme intensif de six modules répartis sur six cohortes. Une organisation rodée qui témoigne du sérieux de l’initiative.

« Les vecteurs du changement » selon la CNMP

Lors de la cérémonie de graduation, les discours ont été à la hauteur des enjeux. Dalberg Claude, coordonnateur de la CNMP, n’a pas mâché ses mots : « Ils sont les vecteurs du changement, les ambassadeurs de la bonne gouvernance, les garants de la transparence et les catalyseurs de l’efficacité. »

Une rhétorique qui rappelle les grandes promesses du passé, mais qui cette fois s’appuie sur une formation concrète et des compétences techniques précises. Les nouveaux certifiés maîtrisent désormais la réglementation des bailleurs, la planification et la gestion de projets, ainsi que la gestion de contrats.

L’UEH mise sur la continuité

Le recteur de l’UEH, Dieuseul Prédelus, a profité de l’occasion pour réaffirmer l’engagement de son institution. « L’UEH regorge de compétences prêtes à être mobilisées », a-t-il déclaré, tout en exhortant les nouveaux diplômés à « défendre les normes et à protéger les ressources publiques avec intégrité. »

Cette approche s’inscrit dans une vision à long terme : un master en passation, gestion et gouvernance des marchés publics a d’ailleurs été lancé le 14 février dernier, témoignant de la volonté de professionnaliser durablement le secteur.

Un défi de taille pour la transparence

Pour comprendre l’importance de cette initiative, il faut la replacer dans le contexte haïtien. Depuis des décennies, la gestion des marchés publics fait l’objet de critiques récurrentes, alimentant la méfiance des citoyens et des partenaires internationaux. Les scandales liés aux fonds PetroCaribe ou aux projets de reconstruction post-séisme ont marqué les esprits.

Eric Valbrun, manager de projets à l’UCP/MEF, l’a souligné : ces agents certifiés sont « désormais mieux outillés pour contribuer efficacement à la gestion des marchés publics. » Une nécessité absolue dans un pays où chaque gourde dépensée compte.

L’espoir d’un système plus fiable

Cette formation s’inscrit dans un mouvement plus large de renforcement des capacités institutionnelles. Pour les Haïtiens, tant ceux qui vivent les conséquences directes de la mauvaise gouvernance que ceux de la diaspora qui suivent de près l’évolution du pays, cette initiative représente un espoir tangible.

La question reste cependant entière : ces 150 professionnels certifiés auront-ils les moyens et la volonté de transformer réellement les pratiques ? Dans un environnement où les pressions politiques et les intérêts particuliers restent forts, leur mission s’annonce complexe.

Le pari de la transparence est lancé. Reste à voir si cette nouvelle génération de professionnels saura résister aux tentations et faire honneur à leur formation. L’avenir de la confiance publique en dépend peut-être.

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