Le président colombien Gustavo Petro débarque ce vendredi 18 juillet à Port-au-Prince pour sa deuxième visite en Haïti en moins de six mois. Au programme : ouverture d’une ambassade et discussions stratégiques sur la sécurité, dans le cadre d’une coopération sud-sud encouragée par Washington.

Un retour attendu depuis janvier

Gustavo Petro n’est pas un inconnu en terre haïtienne. L’ancien maire de Bogota avait déjà foulé le sol haïtien le 23 janvier dernier, mais cette fois-ci à Jacmel, dans le cadre d’une visite qui avait marqué les esprits. Six mois plus tard, le voici de retour à Port-au-Prince, accompagné de son ministre de la Défense Pedro Arnulfo Sanchez Suarez, pour une mission qui s’annonce plus substantielle.

Cette visite témoigne d’une volonté claire de Bogota de renforcer ses liens avec Haïti, au moment où la région cherche des solutions collectives à la crise sécuritaire qui ébranle le pays depuis des années.

Un programme chargé : diplomatie et sécurité au menu

Leslie Voltaire, le conseiller présidentiel qui avait déjà accueilli Petro en janvier lorsqu’il dirigeait le Conseil présidentiel de transition (CPT), a dévoilé les grandes lignes de cette visite éclair. « Il sera dans nos murs dans la matinée. Il aura une séance de travail avec nous. Après, il va procéder à l’ouverture de l’ambassade de Colombie en Haïti. Ensuite, nous organiserons une réception en son honneur », a-t-il expliqué.

L’ouverture de cette ambassade représente un geste fort de la Colombie envers Haïti. Pour un pays qui peine à maintenir ses relations diplomatiques stables, cette initiative colombienne envoie un signal positif aux autres nations de la région et au-delà.

L’expertise colombienne : un atout précieux pour Haïti

La présence du ministre de la Défense colombien n’est pas anodine. La Colombie, qui a traversé des décennies de conflit avec les groupes armés, les cartels de la drogue et les paramilitaires, possède une expérience unique dans la lutte contre l’insécurité. Cette expertise pourrait s’avérer précieuse pour Haïti, confronté à une situation sécuritaire qui rappelle par certains aspects les heures sombres du conflit colombien.

Pedro Arnulfo Sanchez Suarez était d’ailleurs attendu en Haïti depuis plus d’un mois, signe que cette coopération sécuritaire était déjà dans les cartons des deux gouvernements.

Washington pousse ses pions dans la région

Cette visite s’inscrit dans une stratégie plus large orchestrée par les États-Unis, qui cherchent à impliquer davantage les pays de la région dans la résolution de la crise haïtienne. L’Organisation des États américains (OEA) sert de cadre à cette approche multilatérale.

Le 5 mai dernier, l’amiral Alvin Holsey, chef du Commandement Sud des États-Unis qui supervise les opérations militaires américaines en Amérique centrale, en Amérique du Sud et dans les Caraïbes, avait rencontré le ministre colombien de la Défense. À l’issue de cette rencontre, le ministère colombien de la Défense avait révélé que les États-Unis « avaient exprimé leur intérêt à avancer avec la Colombie sur une stratégie multinationale de soutien à Haïti ».

Une coopération sud-sud prometteuse

Pour Haïti, cette approche présente l’avantage de la proximité culturelle et géographique. La Colombie et Haïti partagent certaines réalités : des défis sécuritaires complexes, des problèmes de narcotrafic, et des expériences similaires dans la gestion des crises institutionnelles.

Cette coopération sud-sud pourrait également permettre à Haïti de diversifier ses partenariats, traditionnellement centrés sur les États-Unis, la France et le Canada. L’expertise colombienne en matière de désarmement, de réinsertion des ex-combattants et de lutte contre les groupes armés pourrait offrir des solutions adaptées au contexte haïtien.

L’enjeu de la continuité

Le défi pour les autorités haïtiennes sera de transformer cette visite en partenariat durable. Trop souvent, les initiatives diplomatiques se limitent aux annonces et aux cérémonies d’ouverture, sans suivi concret sur le terrain.

La diaspora haïtienne, notamment celle établie en Colombie et dans la région, observe avec attention ces développements. Pour ces compatriotes qui ont fui l’insécurité, tout progrès dans la coopération régionale représente un espoir de stabilisation du pays.

Un test de crédibilité pour la diplomatie haïtienne

Cette deuxième visite de Gustavo Petro en Haïti pourrait marquer le début d’une nouvelle ère dans les relations entre les deux pays. Mais comme toujours en politique haïtienne, c’est la mise en œuvre qui sera déterminante.

Les Haïtiens, qu’ils vivent à Port-au-Prince, à Jacmel ou à Bogota, attendent de voir si cette coopération se traduira par des résultats concrets sur le terrain. Car au-delà des discours diplomatiques, c’est la sécurité quotidienne des citoyens qui reste l’enjeu central de toutes ces initiatives.

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