Le président colombien était attendu pour deux jours à Port-au-Prince. Il n’y est resté que quelques heures, laissant journalistes et observateurs sur leur faim. Entre rendez-vous annulés et silence radio, cette visite éclair soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.

Vendredi 18 juillet 2025 restera comme un jour étrange dans les relations haïtiano-colombiennes. Gustavo Petro, le président de la Colombie, a effectué une visite express à Port-au-Prince qui a laissé tout le monde perplexe. Programmée pour durer deux jours, sa présence s’est limitée à quelques heures marquées par l’improvisation et le mystère.

Un accueil qui tourne court

Dès 14 heures, l’avion présidentiel se pose à l’aéroport Toussaint Louverture. Mais contrairement à sa première visite en janvier dernier à Jacmel – où il avait multiplié les déclarations et les images symboliques – cette fois, tout semble bâclé. À la Villa d’accueil, Gustavo Petro rencontre bien Fritz Alphonse Jean, président du Conseil présidentiel de transition, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et quelques ministres. Mais l’atmosphère n’y est pas.

Pas de discours marquant, pas de poignée de main chaleureuse devant les caméras. Le dirigeant colombien ressort de la salle du conseil des ministres l’air moins enthousiaste qu’à son arrivée, laissant planer un malaise palpable.

La presse haïtienne mise à l’écart

Pour les journalistes haïtiens, c’est le parcours du combattant. D’abord convoqués pour un point de presse conjoint à la Villa d’accueil, ils sont ensuite redirigés vers le consulat colombien à Pétion-Ville. Là, nouvelle déception : seuls les journalistes colombiens et les équipes de communication gouvernementales ont droit aux informations. Les médias haïtiens, eux, patientent dehors.

Cette mise à l’écart de la presse locale rappelle douloureusement certaines pratiques du passé où les Haïtiens étaient tenus à l’écart des discussions les concernant directement. Une situation d’autant plus frustrante que cette visite était censée renforcer la coopération entre les deux pays.

Un départ précipité qui intrigue

Après quatre heures d’attente entre la Villa d’accueil et le consulat, les journalistes sont finalement convoqués au Karibe Hôtel pour un cocktail officiel. Mais surprise : l’invité d’honneur a déjà pris la direction de l’aéroport ! Fritz Jean, visiblement gêné, évoque des « conditions météorologiques défavorables » pour justifier ce départ anticipé. Une explication qui ne convainc personne, surtout un jour où le temps était plutôt clément dans la capitale.

Des projets ambitieux sur le papier

Malgré cette visite ratée sur le plan de la communication, les deux présidences ont tenté de sauver les apparences. Dans un communiqué publié avant même la fin des rencontres, la Primature haïtienne évoquait des « échanges stratégiques » sur la sécurité, la formation des forces armées et policières, ainsi que la consolidation des partenariats institutionnels.

De son côté, la présidence colombienne s’est fendue de quelques tweets pour annoncer l’inauguration officielle de l’ambassade de Colombie en Haïti et évoquer des avancées dans la lutte contre le trafic de drogue, le commerce, l’éducation et la sécurité.

Questions sans réponses

Reste que cette visite éclair soulève de nombreuses interrogations. Qu’est-ce qui a pu provoquer un changement d’agenda aussi radical ? Y a-t-il eu des désaccords lors des discussions bilatérales ? Les « conditions météorologiques » invoquées cachent-elles autre chose ?

Pour un pays comme Haïti, qui cherche désespérément des partenaires fiables dans la région, cette visite bâclée envoie un message peu rassurant. D’autant que la Colombie, avec son expérience dans la lutte contre les groupes armés, pourrait être un allié précieux dans le contexte sécuritaire actuel.

Cette visite manquée illustre une fois de plus les difficultés d’Haïti à établir des relations diplomatiques stables avec ses voisins. Entre promesses non tenues et communications ratées, quand le pays parviendra-t-il enfin à sortir de cet isolement qui ne fait qu’aggraver ses problèmes ? La diaspora haïtienne, témoin de ces échecs répétés, attend toujours des dirigeants capables de redonner crédit à la diplomatie haïtienne.

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