Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) tire la sonnette d’alarme sur plusieurs dépenses publiques controversées du Conseil Présidentiel de Transition. Dans une lettre ouverte, l’organisation dénonce à la fois un voyage jugé disproportionné d’une délégation de 20 personnes au Brésil, au Canada, au Chili et aux États-Unis, ainsi qu’un financement de 182 millions de gourdes accordé aux médias pour de la propagande.

Un voyage disproportionné avec 20 personnes

Le RNDDH ne mâche pas ses mots dans sa correspondance datée du 14 juillet 2025. L’organisation de défense des droits humains dénonce principalement la composition excessive de la délégation du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) pour ce voyage d’observation constitutionnelle.

Cette mission internationale, qui devait permettre aux membres du CPT d’étudier les systèmes constitutionnels d’autres pays, a mobilisé une délégation de 20 personnes – un nombre jugé excessif et inapproprié par le RNDDH. Cette délégation incluait des membres du CPT accompagnés de neuf femmes, dans des conditions qui soulèvent des questions sur la nécessité réelle d’un tel déploiement.

182 millions de gourdes pour la propagande médiatique

Mais la controverse ne s’arrête pas là. Le RNDDH révèle une autre dépense qui fait scandale : le gouvernement a débloqué 182 millions de gourdes destinées à financer des campagnes de propagande dans les médias. Cette somme colossale a été allouée à l’Association Nationale des Médias Haïtiens (ANMH) et à l’Association des Médias Indépendants (AMI) pour mener ce que le RNDDH qualifie de « plaidoyer » autour de la nouvelle constitution.

Cette révélation soulève des questions fondamentales sur l’utilisation des fonds publics dans un contexte où les Haïtiens font face à des difficultés économiques majeures. Pour beaucoup, cette somme aurait pu être investie dans des secteurs prioritaires comme la santé, l’éducation ou la sécurité publique.

Le CPT sur la sellette depuis sa formation

Depuis sa mise en place, le CPT fait face à de nombreuses critiques. Le RNDDH rappelle que le comité de pilotage de la conférence nationale, créé pour réviser la Constitution, avait été dissous après que des fonds de l’État lui aient été débloqués sans justification claire.

La situation s’est encore compliquée en mai 2025 quand le CPT a reçu un avant-projet de constitution qui « favorise nettement les observateurs » au détriment des autres acteurs politiques. Cette constitution fantoche, selon le RNDDH, viole les droits fondamentaux et représente une menace pour la démocratie haïtienne.

Une délégation sans légitimité démocratique

L’organisation souligne un paradoxe troublant : une délégation dirigée par un « président observateur sans droit de vote » (Prinèl Joseph) entreprend un voyage coûteux pour étudier des systèmes démocratiques, alors que cette même délégation n’a aucune légitimité démocratique.

Un timing particulièrement mal choisi

Ces dépenses interviennent à un moment où Haïti fait face à des défis majeurs. Le pays aux ressources limitées voit sa population appauvrie subir de plein fouet la crise économique, tandis que l’insécurité continue de gangréner le territoire national.

Pour le RNDDH, ces pratiques – voyage avec une délégation excessive et financement de propagande médiatique – représentent une « vaste opération de gaspillage » qui détourne des ressources précieuses des vrais besoins du peuple haïtien. L’organisation estime que dans un pays où les citoyens n’ont pas accès aux services de base, de telles dépenses sont tout simplement inadmissibles.

Un appel à l’arrêt immédiat

Face à cette situation, le RNDDH exige du CPT qu’il prenne « toutes les dispositions nécessaires afin d’arrêter immédiatement cet énième scandale de gaspillage de fonds publics. » L’organisation recommande également que tous les secteurs de la société soient consultés avant tout projet de constitution, conformément aux engagements pris le 3 avril 2024.

Cette nouvelle polémique vient s’ajouter à la longue liste des dysfonctionnements qui minent la confiance du peuple haïtien envers ses dirigeants. Dans un pays où chaque gourde compte pour la survie quotidienne de millions de citoyens, les Haïtiens d’ici et d’ailleurs attendent des comptes clairs sur l’utilisation de leurs deniers publics. La question demeure : quand nos dirigeants comprendront-ils enfin que la priorité doit être accordée aux besoins urgents du peuple plutôt qu’aux voyages de prestige ?

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