Les réseaux sociaux s’enflamment autour de prétendues pertes de bagages à l’aéroport international du Cap-Haïtien. Devant la polémique, l’Autorité aéroportuaire nationale monte au créneau pour se dédouaner de toute responsabilité.
Depuis quelques semaines, les témoignages se multiplient sur Facebook, WhatsApp et TikTok : des voyageurs haïtiens dénoncent la disparition mystérieuse de leurs valises à l’aéroport Hugo Chávez du Cap-Haïtien. Entre accusations de vol et soupçons de négligence, la tension monte. Face à cette vague de critiques qui ternit l’image de cette infrastructure vitale pour le nord d’Haïti, Yves Ducarmel François, directeur général de l’Autorité aéroportuaire nationale (AAN), a organisé une conférence de presse jeudi dernier pour remettre les pendules à l’heure.
L’AAN rejette toute implication dans la gestion des bagages
« Anpil moun pa konprann travay nou an », pourrait résumer la position du directeur François. Selon lui, l’AAN n’a strictement rien à voir avec les bagages des passagers. « Notre mission est de permettre aux avions de décoller et d’atterrir dans les meilleures conditions. Nous ne gérons pas les passagers ni leurs valises. Nous ne vendons pas de billets d’avion », a-t-il martelé avec insistance.
Cette distinction peut paraître évidente pour certains, mais elle semble échapper à de nombreux voyageurs qui pointent automatiquement du doigt l’aéroport lorsque leurs affaires disparaissent. Pour le responsable, la responsabilité incombe entièrement aux compagnies aériennes, depuis l’enregistrement jusqu’à la récupération des bagages.
« Bagay yo pa ka pèdi nan yon ti kote konsa »
Le directeur François se veut catégorique : l’aéroport du Cap-Haïtien ne dispose pas de zones obscures où les bagages pourraient mystérieusement s’évaporer. « À l’arrivée, les passagers peuvent voir leurs valises depuis le tarmac jusqu’au point de récupération. Il n’existe pas de grande distance à l’intérieur de l’aéroport où un bagage pourrait être perdu », assure-t-il.
Cette transparence géographique, selon lui, devrait rassurer les voyageurs. Contrairement aux méga-aéroports internationaux où les bagages transitent par des kilomètres de tapis roulants et d’entrepôts, l’infrastructure du Cap-Haïtien reste à taille humaine.
Les vrais coupables selon l’AAN
Alors, où disparaissent réellement les bagages ? Yves Ducarmel François évoque plusieurs possibilités : les problèmes peuvent survenir à l’étranger (notamment dans les aéroports de correspondance comme Miami ou Fort-Lauderdale, bien connus des Haïtiens), durant le chargement, ou même après l’arrivée, hors du périmètre de l’aéroport.
Pour les produits confisqués lors des contrôles de sécurité – liquides, aliments périssables, objets potentiellement dangereux – le directeur rappelle que ces mesures suivent les normes internationales de sécurité. « Il ne s’agit pas d’initiatives des employés de l’AAN, mais de mesures de sécurité obligatoires », précise-t-il.
Un débat qui interpelle toute la communauté haïtienne
Cette polémique dépasse le simple cadre local. Pour les Haïtiens de la diaspora qui transitent régulièrement par cet aéroport – que ce soit pour les vacances d’été, les fêtes de fin d’année ou les urgences familiales – la fiabilité du transport de leurs bagages représente un enjeu crucial. Ces valises contiennent souvent bien plus que des vêtements : médicaments pour la famille restée au pays, cadeaux, parfois même de petits équipements électroniques qui feront la différence au quotidien.
L’absence de rapports officiels confirmant des pertes systématiques laisse planer le doute. S’agit-il de cas isolés amplifiés par les réseaux sociaux, ou d’un véritable problème structurel ?
La balle est désormais dans le camp des voyageurs : l’AAN les invite à documenter précisément tout incident et à suivre les procédures établies pour porter plainte. Car au-delà des accusations et des démentis, c’est la confiance des usagers dans cette infrastructure stratégique qui est en jeu. Et dans un pays où chaque voyage représente souvent un investissement considérable, cette confiance n’a pas de prix.