Le 1er juin 2021, les gangs s’emparaient de Martissant. Quatre années plus tard, le bilan est catastrophique : 28 localités sous contrôle criminel, plus d’un million de déplacés, et un pays au bord de l’effondrement total. Le rapport choc du CARDH révèle l’ampleur d’une tragédie qui a transformé Haïti en territoire terroriste.

Il y a exactement quatre ans, le 1er juin 2021, Haïti basculait dans un cauchemar qui perdure encore aujourd’hui. Ce jour-là, les gangs armés prenaient le contrôle de Martissant, cette commune stratégique qui constitue l’entrée Sud de Port-au-Prince. Personne ne pouvait imaginer à l’époque que cette victoire criminelle marquerait le début de la conquête systématique du territoire national.

Aujourd’hui, le Centre d’Analyse et de Recherche en Droits de l’Homme (CARDH) dresse un bilan glaçant : 28 localités haïtiennes sont désormais sous l’emprise des gangs, dont 25 rien que dans le département de l’Ouest.

Martissant : la porte d’entrée de l’enfer

Tout a commencé sous la présidence de Jovenel Moïse, quand les gangs « Gran Ravin » et « Ti Bwa » se sont affrontés pour le contrôle de Martissant. Le groupe « Gran Ravin » a fini par l’emporter, chassant le chef de gang « Krisla » et transformant cette zone en ce que les habitants appellent désormais « la vallée de l’ombre de la mort ».

Ce nom n’est pas exagéré. En quelques semaines, Martissant est devenue impraticable. Les bus de transport en commun étaient pris pour cibles, les civils abattus en pleine rue, les institutions publiques incendiées. Le sous-commissariat lui-même a été réduit en cendres par les bandits.

Pour nos compatriotes qui ont vécu cette période, le souvenir reste traumatisant. Du jour au lendemain, des milliers de familles ont dû abandonner leurs maisons, leurs commerces, leur vie, pour fuir cette violence inexplicable.

L’exode et les routes de la survie

Face à cette situation, les habitants ont développé des stratégies de survie dignes d’un pays en guerre. Ne pouvant plus emprunter la route principale, ils ont commencé à utiliser des chemins de montagne comme « Ti Kajou » ou « Tara’s », souvent à moto, pour accéder aux autres zones de la capitale.

Mais même ces voies de contournement sont devenues des pièges. Des groupes armés y ont établi des points de contrôle illégaux, exigeant des « droits de passage ». Imaginez : pour aller travailler ou voir votre famille, vous devez payer une taxe à des criminels !

Cette réalité, nos frères et sœurs de la diaspora ont du mal à la concevoir. Comment peut-on vivre dans un pays où se déplacer devient un parcours du combattant payant ?

Une expansion criminelle planifiée

Ce qui rend cette situation encore plus terrifiante, c’est que la prise de Martissant n’était que le début. Selon le CARDH, elle a constitué « le point de départ de l’expansion territoriale des gangs ». Depuis, ces groupes ne cessent de mener des attaques contre d’autres communes pour élargir leur territoire.

La stratégie a même évolué. Si auparavant les gangs se battaient entre eux pour le territoire, ils agissent désormais en coalition sous la bannière criminelle « Viv Ansanm » pour étendre leur emprise nationale. Une coordination qui fait froid dans le dos.

Les chiffres de l’apocalypse

Les statistiques révélées par le CARDH donnent le vertige :

  • 28 localités sous contrôle des gangs
  • 102 institutions publiques déplacées, vandalisées ou incendiées
  • 622 structures privées détruites
  • Plus d’un million de déplacements forcés (1 064 935 exactement)

Et ce n’est que le début. L’ONU estime que près de 85% de Port-au-Prince est désormais sous contrôle des gangs. Durant le premier trimestre 2025 seulement, plus de 1 600 personnes ont été tuées et 500 blessées.

Quand l’Amérique reconnaît la réalité

Le 3 mai dernier, l’administration américaine a officiellement désigné les gangs haïtiens comme « organisations terroristes internationales ». Cette reconnaissance, que le CARDH salue, confirme ce que nous savons tous : Haïti n’est plus aux prises avec de simples criminels, mais avec de véritables terroristes.

Mais cette désignation, aussi importante soit-elle, ne suffit pas. Sans actions concrètes et coordonnées, prévient le CARDH, « Haïti pourrait devenir un territoire entièrement contrôlé par des groupes terroristes, y compris au sein même de ses institutions ».

Un plan de sauvetage urgent

Face à cette situation catastrophique, le CARDH propose un plan d’urgence ambitieux :

  • Création d’une unité antiterroriste bien équipée
  • Augmentation massive des effectifs de la PNH et des Forces armées
  • Levée de l’embargo sur les armes (imposé depuis 1991)
  • Construction d’une prison de haute sécurité
  • Mise en place de programmes de réinsertion pour les enfants recrutés par les gangs

L’appel de la diaspora

Mes chers compatriotes de la diaspora, vous qui nous suivez depuis New York, Miami, Montréal, Paris ou ailleurs, cette situation vous concerne directement. Ces territoires perdus, c’est votre pays d’origine qui disparaît peu à peu.

Vos familles restées au pays vivent cette terreur au quotidien. Vos enfants nés à l’étranger risquent de grandir sans jamais pouvoir visiter la terre de leurs ancêtres.

Il est temps d’agir. Interpellez vos élus dans vos pays de résidence. Soutenez les organisations qui luttent pour les droits humains en Haïti. Faites entendre votre voix.

Le compte à rebours a commencé

Quatre ans après Martissant, Haïti se trouve à un tournant décisif. Soit nous agissons maintenant avec détermination pour reconquérir notre territoire, soit nous assistons à la transformation définitive de notre pays en État terroriste.

Petite-Rivière dans l’Artibonite, plusieurs communes de Port-au-Prince, des villes de province… Chaque jour qui passe, la liste des territoires perdus s’allonge.

La question n’est plus de savoir si nous pouvons encore sauver Haïti. La question est de savoir si nous en avons encore la volonté.

Car dans cette course contre la montre, chaque jour compte. Et le temps presse dangereusement.

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