Le décret référendaire est publié, mais le projet de Constitution reste introuvable. Pendant ce temps, le CPT joue contre la montre avec seulement 7 mois pour organiser un vote dans un pays où les gangs contrôlent des communes entières. Une course folle qui interroge sur les vraies priorités du pouvoir.

Imaginez organiser des élections dans un pays où certaines zones sont devenues des territoires interdits, où les citoyens fuient par milliers et où l’insécurité règne en maître. C’est pourtant le défi que s’est lancé le Conseil présidentiel de transition (CPT) avec la publication du décret référendaire le 3 juillet dernier.

Plus d’un mois après la présentation du projet de Constitution au pays, le Comité de pilotage garde le silence radio. Pendant ce temps, les communes de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, de l’Artibonite et du Centre restent sous contrôle des groupes criminels. Une situation qui rend l’organisation du référendum pour le moins… optimiste.

Un timing serré dans un contexte explosif

Le CPT dispose désormais de seulement 7 mois pour accomplir ce qu’il n’a pas réussi à faire en 14 mois : rétablir un minimum de sécurité dans le pays. Car selon l’Accord du 3 avril 2024, l’organisation du référendum fait partie de son mandat, mais elle devait s’accompagner d’une amélioration de la situation sécuritaire.

Or, depuis la prise du pouvoir le 25 avril, c’est l’inverse qui s’est produit. La situation s’est dégradée, poussant encore plus de familles haïtiennes sur les routes de l’exil. Nos compatriotes de la diaspora regardent avec inquiétude ce pays qui semble s’enfoncer davantage dans le chaos.

Des centres de vote… en territoire hostile

Le décret référendaire prévoit l’installation d’au moins deux centres de vote par section communale. Une belle intention sur le papier, mais comment faire quand certaines de ces sections sont contrôlées par des gangs armés ? Comment garantir la sécurité des électeurs quand même les forces de l’ordre peinent à circuler librement dans certaines zones ?

L’article 27 du décret prévoit bien la nomination d’agents de sécurité référendaire dans chaque centre de vote, mais ces agents auront-ils les moyens de faire face à la réalité du terrain ? La question reste entière.

Une diaspora appelée aux urnes

Point positif : le décret prévoit que les Haïtiens de la diaspora pourront voter « dans les conditions et selon les procédures définies par le CEP dans les pays où ce vote se déroule ». Une reconnaissance importante pour ces millions de compatriotes qui continuent d’envoyer des milliards de dollars au pays et qui méritent d’avoir leur mot à dire sur l’avenir constitutionnel d’Haïti.

Le vote nécessitera une carte d’identification nationale, un passeport ou un certificat de l’ONI. Autant de documents qui posent déjà problème à de nombreux Haïtiens, que ce soit au pays ou à l’étranger, en raison des dysfonctionnements administratifs.

Un projet de Constitution fantôme

Le plus troublant dans cette histoire, c’est que le projet de Constitution doit être publié dans Le Moniteur au moins 60 jours avant le référendum. Mais où est-il ? Plus d’un mois après sa présentation, le Comité de pilotage reste muet. Comment peut-on organiser un référendum sur un texte que personne ne peut consulter ?

Cette situation rappelle ces promesses électorales qui ne voient jamais le jour. Les Haïtiens ont-ils vraiment le temps de jouer à cache-cache avec leur avenir constitutionnel ?

Une course contre la montre

Le scrutin, s’il a lieu, se déroulera de 6h du matin à 4h de l’après-midi. Le projet sera adopté s’il obtient la majorité des suffrages exprimés. Simple en théorie, mais complexe dans la pratique quand on sait que de nombreux Haïtiens n’ont même plus accès à leurs quartiers, chassés par l’insécurité.

Le CPT semble déterminé à organiser ce référendum coûte que coûte, mais à quel prix ? Pendant que nos dirigeants se focalisent sur des échéances constitutionnelles, le pays continue de saigner. Ne serait-il pas plus urgent de reconquérir d’abord les territoires perdus et de garantir la sécurité des citoyens ? Nos compatriotes de la diaspora et ceux restés au pays méritent mieux qu’un référendum organisé dans la précipitation et l’insécurité.

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