L’ancien Premier ministre Claude Joseph a comparu ce mercredi devant la Cour d’appel dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse. Dans une audition très attendue, il a rejeté en bloc les accusations et pointé du doigt les « vrais responsables ».

Près de quatre ans après l’assassinat du président Jovenel Moïse, l’enquête judiciaire continue de faire des vagues. Ce mercredi 25 juin 2025, Claude Joseph, l’homme qui dirigeait le gouvernement au moment du drame du 7 juillet 2021, s’est présenté devant la Cour d’appel pour une audition cruciale, reportée suite à l’assassinat de l’avocat Pierre Antoine Borgat.

« Ce ne sont pas les zombis qui ont tué le président »

Face aux magistrats, l’ancien Premier ministre n’a pas mâché ses mots. En créole, il a lancé une phrase qui résume sa défense : « Se je wont je jij la pa di se Jovenel ki touye tèt li, se je wont je ki fè se pa zonmi yo ki vin la » (Si vous voulez que le juge dise que ce n’est pas Jovenel qui s’est tué lui-même, alors vous devez faire en sorte que ce ne soient pas les zombis qui viennent ici).

Cette déclaration imagée, typique du langage politique haïtien, traduit la frustration de Claude Joseph face à ce qu’il considère comme une mascarade judiciaire. Le leader du parti « Les Engagés pour le Développement » (EDE) a catégoriquement rejeté toutes les accusations portées contre lui par l’ordonnance du juge Walter Wesser Voltaire.

20 millions de dollars : qui avait les moyens ?

L’une des révélations les plus marquantes de cette audition concerne le financement présumé de l’assassinat. Claude Joseph a affirmé qu’un Dominicain avait déclaré que plus de 20 millions de dollars américains avaient été dépensés pour éliminer le président. Une somme colossale qui soulève des questions sur l’identité des commanditaires.

« Qui dans ce pays possède de telles ressources financières ? Qui a intérêt à contribuer pour assassiner le président Jovenel Moïse ? Ti Claude [lui-même], Martine Moïse, Rénald Lubrérice, Ardouin Zéphirin, ses plus proches ? », s’est-il interrogé devant la Cour, utilisant l’ironie pour démontrer l’absurdité des accusations selon lui.

Les « vrais ennemis » de Jovenel Moïse

Selon l’ancien Premier ministre, le président défunt avait des « positions claires contre des individus et des familles qui ont pris en otage des secteurs importants du pays ». Ces puissants, explique-t-il, étaient régulièrement dénoncés par Jovenel Moïse, qui n’hésitait pas à résilier leurs « contrats juteux ».

Cette révélation éclaire d’un jour nouveau les motivations possibles du crime. Pour Claude Joseph, c’est précisément cette politique de confrontation avec les oligarques qui a coûté la vie au président. « La position de Jovenel Moïse représentait une menace pour sa vie », a-t-il déclaré.

Des accusations contre l’ancien régime

L’audition a également été l’occasion pour Claude Joseph de régler ses comptes avec l’administration d’Ariel Henry, qui lui a succédé. Il a notamment accusé l’ancien Premier ministre d’avoir exigé du commissaire Claude Bed-Ford qu’il lui soumette les mandats d’arrêt avant leur émission, suggérant une ingérence politique dans la justice.

Ces révélations s’inscrivent dans un contexte où de nombreux Haïtiens, tant au pays que dans la diaspora, questionnent la sincérité des différentes enquêtes menées depuis 2021. Beaucoup se demandent si la vérité sur cet assassinat qui a plongé Haïti dans le chaos sera un jour établie.

Une coopération affichée avec la justice

Malgré ses critiques virulentes contre l’ordonnance qu’il qualifie « d’inique et bancale conçue pour récompenser les assassins et ses adversaires politiques », Claude Joseph maintient sa volonté de coopérer avec la justice. Sur Twitter, il avait annoncé sa présence : « Depuis le début de cette procédure, je n’ai jamais manqué une seule occasion de coopérer pleinement avec la justice. »

Cette audition de Claude Joseph relance le débat sur l’enquête judiciaire autour de l’assassinat de Jovenel Moïse. Alors que les Haïtiens attendent toujours la vérité sur ce crime qui a marqué l’histoire récente du pays, les déclarations de l’ancien Premier ministre soulèvent de nouvelles questions sur les véritables commanditaires. La justice haïtienne saura-t-elle faire la lumière sur cette affaire qui continue de hanter la nation ? L’avenir nous le dira, mais une chose est sûre : le peuple haïtien mérite de connaître la vérité.

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