PORT-AU-PRINCE, vendredi 31 janvier 2025 – Une vague de violence d’une ampleur inédite a frappé la commune de Kenscoff dans la nuit du dimanche 26 au lundi 27 janvier 2025. Selon un rapport du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), une attaque coordonnée a été menée par le groupe armé “Viv Ansanm”, causant la mort d’au moins 50 personnes et réduisant en cendres plus d’une centaine de maisons.
Le rapport du RNDDH précise que l’assaut s’est concentré sur plusieurs localités, notamment Bongard, Souçailles, Chauffard, Via, Bélot, Kafou Bèt, Mache Gode, Barrouette et Bwa Majò. « Les assaillants ont attaqué aux alentours de trois heures du matin, utilisant des armes lourdes et semant la panique parmi les habitants », indique l’organisation.
Une attaque planifiée et d’une extrême brutalité
D’après les informations recueillies, le groupe criminel aurait bénéficié de la complicité de Pierfils Orvil, un ancien détenu natif de la région, qui aurait facilité leur passage vers les zones ciblées. Les agresseurs auraient emprunté un itinéraire à travers les montagnes de Carrefour pour atteindre Bèlisèt avant de fondre sur leurs cibles à Chauffard, Bongo, Kafou Bèt et Mache Gode.
Des témoignages glaçants rapportent que les bandits ont ouvert le feu sans distinction, exécutant hommes, femmes et enfants, tout en incendiant les habitations. « Ils ont tiré sur tout ce qui bougeait. Les flammes ont dévoré des maisons entières avec des familles encore à l’intérieur », a confié un survivant au RNDDH.
Une réponse tardive des forces de l’ordre
Les forces de sécurité ne sont intervenues qu’au matin du lundi 27 janvier. Des unités spécialisées de la Police nationale d’Haïti (PNH), soutenues par des éléments de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), se sont déployées sous la supervision du directeur général de la PNH, Normil Rameau.
Si l’intervention policière a permis de repousser les assaillants dans certaines zones, des localités comme Bélot, Kafou Bèt, Krevitè et Bwa Majò restent sous contrôle criminel. « L’accès est rendu difficile par des barricades installées par les bandits et la dégradation des routes », souligne le RNDDH.
Des affrontements entre la PNH et les criminels ont éclaté, notamment à Godet, Bélot et Obléon. D’après la police, une vingtaine de membres de “Viv Ansanm” auraient été neutralisés, mais la situation demeure extrêmement préoccupante.
Un bilan humain et matériel accablant
Le RNDDH rapporte des pertes humaines effroyables. À Kafou Bèt, une famille entière de six personnes a été massacrée. À Krevitè, cinq autres corps ont été retrouvés au petit matin du 27 janvier. De nombreux cadavres ont été signalés dans les sentiers menant à Bwa Majò, Kafou Bèt et Mache Gode.
Les établissements de santé de la région, notamment l’hôpital de Fermathe, sont débordés par l’afflux de blessés, dont certains dans un état critique.
Par ailleurs, plusieurs figures locales ont été ciblées et exécutées. Le pasteur Lerys Chérius, de l’église Union Fraternité Chrétienne, a été assassiné à Kikwa. À Kafou Bèt, le pasteur Raymond a subi le même sort, tandis que Daniel Tissé, diacre de l’église Baptiste Conservatoire, a été tué avant que les bandits ne transforment son lieu de culte en base d’opérations. À Berthe, douze membres de la famille Joseph ont été exécutés.
Sur le plan matériel, plus de 100 maisons ont été réduites en cendres, forçant des centaines de personnes à fuir. Le RNDDH rapporte que dans la nuit du 28 janvier, les criminels ont poursuivi leur saccage en attaquant Bwa Majò et Ti Plas.
Un appel urgent à l’action
Le RNDDH appelle à une intervention rapide et efficace des autorités. L’organisation insiste sur la nécessité d’un renforcement immédiat des forces de l’ordre dans les zones accessibles et d’un déploiement stratégique pour empêcher une nouvelle offensive contre Furcy, Obléon et Clémenceau, qui demeurent vulnérables.
Le rapport souligne également que les assaillants ont délibérément saboté les routes pour isoler ces localités et compliquer toute riposte sécuritaire. « Leur objectif semble être l’établissement d’un contrôle territorial durable », avertit l’organisation.
Le RNDDH exhorte l’État haïtien et la communauté internationale à agir sans délai pour protéger les populations civiles et restaurer l’ordre dans ces zones meurtries. Faute d’actions concrètes, la population de Kenscoff reste exposée à de nouvelles tragédies.