Le Conseil de sécurité de l’ONU a réduit de moitié le mandat du BINUH, passant de 12 à 6 mois seulement. Un signal clair d’impatience face à la situation haïtienne qui s’enlise, mais aussi une pression accrue sur les acteurs locaux.
Après des années de mandats renouvelés presque automatiquement, l’ONU change de ton avec Haïti. Le 14 juillet 2025, le Conseil de sécurité a décidé de ne renouveler le mandat du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH) que jusqu’au 31 janvier 2026. Un mandat raccourci de six mois qui en dit long sur l’exaspération croissante de la communauté internationale.
Un message sans équivoque
Cette décision n’est pas un simple détail administratif. En temps normal, les mandats onusiens sont renouvelés pour une durée d’un an. Mais l’ONU a choisi de mettre le BINUH sous surveillance rapprochée, avec un mandat de six mois seulement. C’est un peu comme si un patron disait à son employé : « On verra dans six mois si tu mérites de continuer. »
Pour comprendre la portée de cette décision, il faut se rappeler que le BINUH est présent en Haïti depuis 2019, succédant à la MINUSTAH qui avait elle-même remplacé d’autres missions onusiennes. Depuis plus de 20 ans, l’ONU accompagne Haïti dans sa quête de stabilité. Mais les résultats tardent à venir.
L’impatience diplomatique
Derrière le langage feutré de la diplomatie onusienne, on peut lire une certaine lassitude. Le Conseil de sécurité « exprime son intention d’examiner sans délai les recommandations faites par le secrétaire général le 24 février 2025 sur les options concernant le rôle que les Nations unies pourraient jouer pour soutenir la sécurité et la stabilité en Haïti. »
Traduction : l’ONU réfléchit sérieusement à changer d’approche. Après des décennies de présence, l’organisation mondiale semble se demander si sa méthode actuelle est la bonne. Pour les Haïtiens, cette remise en question peut être à la fois inquiétante et porteuse d’espoir.
La diaspora haïtienne en questionnement
Cette décision résonne particulièrement dans la diaspora haïtienne, de Brooklyn à Miami, en passant par Montréal et Paris. Beaucoup se demandent si cette pression internationale va enfin pousser les dirigeants haïtiens à prendre leurs responsabilités ou si elle va créer un vide encore plus dangereux.
Pour les familles qui envoient des transferts d’argent chaque mois, pour les professionnels qui rêvent de rentrer investir au pays, pour les étudiants qui espèrent contribuer au développement d’Haïti, cette incertitude est préoccupante.
« Prise en charge par les Haïtiens »
Le Conseil de sécurité réaffirme son engagement à soutenir « une solution globale, prise en charge par les Haïtiens et dirigée par les Haïtiens. » Ces mots, répétés dans toutes les résolutions depuis des années, prennent aujourd’hui une résonance particulière.
L’ONU semble dire : « Nous avons fait notre part, maintenant c’est à vous de jouer. » Cette responsabilisation forcée peut être vue comme un ultimatum déguisé. Si les Haïtiens ne prennent pas les choses en main dans les six prochains mois, l’engagement international pourrait changer de nature.
Entre espoir et inquiétude
Cette décision du Conseil de sécurité arrive à un moment crucial pour Haïti. Le pays traverse une crise multidimensionnelle sans précédent : insécurité, crise politique, effondrement économique. Dans ce contexte, un mandat réduit peut être perçu comme un abandon ou comme un coup de fouet nécessaire.
L’histoire retiendra-t-elle cette date du 14 juillet 2025 comme le moment où l’ONU a commencé à lâcher Haïti ou comme le déclic qui a poussé le pays à enfin prendre son destin en main ?
Six mois, c’est court dans la vie d’une nation, mais c’est peut-être suffisant pour que les leaders haïtiens comprennent que l’aide internationale n’est pas éternelle. La communauté internationale a perdu patience ; il est temps que les Haïtiens, du pays et de la diaspora, se mobilisent pour prouver qu’ils peuvent être les artisans de leur propre salut.