Une étonnante découverte a été faite à Montréal lors d’une enquête qui, à l’origine, semblait être d’une nature bien ordinaire. Derrière un faux mur, dans la résidence d’un homme d’affaires montréalais, les policiers ont mis la main sur une somme colossale de deux millions de dollars en liquide, ainsi que plusieurs armes à feu dissimulées. Cette perquisition, qui a révélé bien plus que ce à quoi les enquêteurs s’attendaient, soulève désormais des questions sur l’origine de cet argent et les activités illégales qui pourraient y être liées.
Une découverte inédite
L’affaire a commencé de façon assez banale, avec une plainte en harcèlement déposée par une ex-conjointe d’André Levy, un homme d’affaires de 74 ans, qui jusque-là était inconnu des services de police. Dans ses déclarations aux enquêteurs du Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL), la femme a fait une révélation surprenante : Levy, selon elle, cacherait entre 2 et 3 millions de dollars chez lui. Elle a aussi mentionné qu’il aurait dissimulé jusqu’à 20 millions dans le sous-sol de son entreprise, Nova Essentials, une société de distribution de produits naturels et biologiques. Elle a même affirmé que cet argent provenait de la vente de produits à la mafia chinoise, qui le payait en liquide.
Quelques jours plus tard, les policiers ont effectué une perquisition à la résidence de M. Levy, située près de l’Oratoire Saint-Joseph. Lors de la fouille, les policiers ont découvert plusieurs caches d’armes à feu dans des meubles et des accoudoirs de canapé. Mais la découverte la plus surprenante est survenue lorsque Levy a montré aux policiers un faux mur dissimulant des liasses d’argent, emballées dans des plastiques noirs : un total de deux millions de dollars en billets.
La requête pour confiscation
Après cette découverte, le Procureur général du Québec (PGQ) a déposé une requête devant la Cour supérieure pour confisquer les 2,1 millions de dollars retrouvés, en arguant que cet argent serait le produit d’activités illégales. Selon le PGQ, la façon dont l’argent a été dissimulé et l’absence d’explication crédible quant à sa provenance sont des éléments qui soulignent l’implication de M. Levy dans des affaires criminelles.
Le PGQ a également mis en avant le fait que Levy n’a déclaré que 1,2 million de revenus personnels sur les 10 dernières années, alors que son entreprise Nova Essentials a déclaré des revenus de 4,4 millions de dollars sur la même période. Selon les autorités, ces revenus ne justifient en aucune manière la possession d’une telle somme d’argent en liquide.
Liens avec le crime organisé
Un autre élément clé de la requête est l’implication possible de cet argent dans des activités liées au crime organisé. Neuf billets retrouvés parmi les liasses de cash avaient été utilisés dans le cadre de l’enquête de la Sûreté du Québec (SQ) en 2014, lors de l’opération Mastiff, un projet d’envergure visant à démanteler un réseau de trafic de stupéfiants dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Ces billets avaient servi à des transactions visant à acheter des drogues ou à rémunérer des membres d’organisations criminelles. Le fait que trois de ces billets aient été retrouvés dans le même ordre, après dix ans, renforce la thèse selon laquelle cet argent aurait circulé dans des milieux criminels.
Le PGQ considère également que la méthode de dissimulation de l’argent (derrière un faux mur et dans des endroits difficiles d’accès) est typique des pratiques observées dans les milieux du crime organisé. De plus, le fait que l’argent ait été retrouvé sous forme de liquide et non sur des comptes bancaires soulève des doutes sur son origine légale.
La défense de M. Levy
André Levy, de son côté, clame son innocence et refuse de céder son argent à l’État. Son avocat, Me Alexandre Bergevin, a rapidement réagi en affirmant qu’il comptait contester la requête du PGQ devant la cour, arguant que la perquisition était fondée sur une « dénonciation mensongère » et que le mandat avait été obtenu « trop rapidement » sans preuves concrètes. M. Levy, qui se considère comme le propriétaire légitime de l’argent, a également réclamé la restitution de son argent, soutenant qu’il l’avait acquis de manière légale.
La situation juridique et les conséquences
Bien qu’il soit légal de détenir de l’argent comptant, la manière dont cet argent a été dissimulé dans la maison soulève de graves questions. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a choisi de ne pas porter de charges criminelles contre André Levy en lien avec l’argent trouvé, mais le PGQ considère que les circonstances entourant cette découverte justifient une confiscation civile. Cette procédure vise à récupérer des biens qui sont considérés comme issus d’activités criminelles, même en l’absence de condamnation pénale.
En décembre dernier, André Levy a comparu devant le tribunal en raison de craintes liées à sa conduite envers son ex-conjointe. Il a accepté une ordonnance « 810 » qui lui interdit de la contacter ou de posséder des armes pendant un an. Cependant, cette affaire complexe pourrait bien aller au-delà des simples accusations de harcèlement, en mettant en lumière d’éventuelles connexions avec le crime organisé.
Une affaire à suivre de près
L’affaire André Levy soulève de nombreuses questions sur l’origine de cet argent et les pratiques de certains individus dans le monde des affaires. Si la justice conclut que cet argent provient d’activités illégales, cela pourrait marquer un précédent important dans la lutte contre le blanchiment d’argent et les liens entre les milieux économiques et criminels. Pour l’instant, l’homme d’affaires, bien qu’il clame son innocence, se trouve dans une situation juridique délicate, où les preuves matérielles et les liens avec des enquêtes criminelles de grande envergure pourraient jouer un rôle déterminant dans le cours de l’affaire.