En plein jour, une soixantaine de bandits armés ont transformé cette paisible commune en zone de guerre. Kidnappings, incendies et pillages : les habitants fuient vers Port-de-Paix tandis que l’État reste silencieux.
Ce jeudi 18 septembre 2025 restera gravé dans la mémoire des habitants de Bassin Bleu. Vers midi, alors que la vie suivait son cours normal dans cette commune du Nord-Ouest, une soixantaine de membres du redoutable gang Ti Bwadòm ont déferle sur la ville, semant la mort et la désolation.
Une attaque d’une violence inouïe
L’offensive a été menée avec une brutalité qui rappelle les heures les plus sombres de l’insécurité haïtienne. Les bandits n’ont épargné aucun symbole de l’autorité : le sous-commissariat de police a été réduit en cendres, les véhicules détruits, et la caisse populaire KOPLES – une institution financière vitale pour cette communauté rurale – a été entièrement pillée.
Plus tragique encore, plusieurs employés de KOPLES ont été kidnappés, ajoutant leurs noms à la longue liste des Haïtiens victimes de cette industrie de l’enlèvement qui gangrène le pays. Un enseignant, pilier de sa communauté, a payé de sa vie cette folie meurtrière. Son corps calciné témoigne de la sauvagerie de ces criminels.
L’exode vers Port-de-Paix
« On était retranchés dans la maison. On a entendu beaucoup de détonations », raconte un témoin, encore traumatisé par ces heures d’épouvante. Cette peur viscérale a poussé des centaines de familles sur les routes poussiéreuses menant à Port-de-Paix, transformant l’exode en un spectacle déchirant.
Des mères portant leurs bébés, des enfants accrochés aux pagnes de leurs grand-mères, des hommes poussant des brouettes chargées de leurs maigres biens : autant d’images qui rappellent douloureusement celles des déplacés de Cité Soleil, de Croix-des-Bouquets ou de tant d’autres communes martyres.
« Je n’ai aucun endroit où aller », confie Antoinette, résidente de Bassin Bleu, résumant en quelques mots le drame de milliers d’Haïtiens contraints de tout abandonner face à la montée de l’insécurité.
Le silence assourdissant de l’État
Alors que sur le terrain, les policiers tentent de rassurer en affirmant que la situation est « sous contrôle », l’absence criante de déclaration officielle des autorités nationales interroge. Cette communication défaillante nourrit l’angoisse des populations et renforce le sentiment d’abandon qui mine la confiance dans les institutions.
Pour nos compatriotes de la diaspora qui suivent avec inquiétude l’évolution de la situation sécuritaire en Haïti, Bassin Bleu illustre parfaitement cette spirale de violence qui touche désormais même les zones rurales autrefois épargnées.
Cette nuit, les habitants de Bassin Bleu dormiront d’un œil, hantés par la peur du retour des bandits. Combien d’autres communes devront-elles subir le même calvaire avant que l’État haïtien ne trouve la force et les moyens de protéger ses citoyens ? La réponse à cette question urgente déterminera l’avenir même de notre pays.