Port-au-Prince, 13 janvier 2025 — Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a vivement réagi face à ce qu’il qualifie de manœuvres suspectes dans le dossier de corruption impliquant trois conseillers du Conseil présidentiel de transition (CPT). Accusés d’avoir exigé 100 millions de gourdes pour maintenir Pascal Raoul Pierre-Louis à la tête de la Banque Nationale de Crédit (BNC), Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire et Louis Gérald Gilles se retrouvent au cœur d’un scandale qui secoue les institutions du pays.
Une enquête compromise par des décisions controversées
Le RNDDH a rappelé que cette affaire, initialement mise en lumière par un rapport de l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) en octobre 2024, semblait progresser lorsque des mandats de comparution avaient été émis par le juge Benjamin Félisme. Cependant, un rebondissement inattendu est survenu en janvier 2025 lorsque le magistrat Claude Jean a annulé ces mandats, arguant que les conseillers incriminés ne pouvaient être jugés par une juridiction de droit commun.
Selon Pierre Espérance, directeur exécutif du RNDDH, cette décision, prise après des rencontres suspectes entre le magistrat et les accusés, soulève de sérieuses questions quant à l’indépendance du système judiciaire. « Cette volte-face érode la confiance du public dans la justice haïtienne et envoie un signal inquiétant à nos partenaires internationaux », a-t-il déclaré.
Un système judiciaire sous pression politique
Le RNDDH a également dénoncé le transfert de l’ancien commissaire du gouvernement, Me Lionel Constant Bourgoin, peu après son refus de classer l’affaire. Pour l’organisation, ce changement de poste pourrait être interprété comme une tentative de dissuader les magistrats de poursuivre des dossiers sensibles.
« Ces manœuvres démontrent l’influence politique sur le système judiciaire, réduisant à néant les efforts de lutte contre la corruption en Haïti », a affirmé le RNDDH dans sa correspondance au ministre de la Justice, Dr. Patrick Pélissier.
Un précédent inquiétant pour la lutte contre la corruption
Ce scandale s’inscrit dans une longue liste d’affaires non résolues, où des fonctionnaires accusés de corruption échappent systématiquement à toute sanction. Malgré la signature de conventions internationales telles que celle des Nations Unies contre la corruption, Haïti peine à honorer ses engagements.
« Si cette affaire n’aboutit pas, cela confirmera que l’impunité reste la règle en Haïti », a averti Pierre Espérance.
Appel à une action immédiate
Le RNDDH exhorte les autorités à garantir la transparence et l’impartialité de l’enquête. L’organisation souligne que l’issue de cette affaire aura un impact direct sur la crédibilité des institutions haïtiennes, tant au niveau national qu’international.
Pour les défenseurs des droits humains, cette affaire représente bien plus qu’un scandale de corruption : elle incarne un test pour la capacité d’Haïti à redresser ses institutions et à restaurer la confiance de sa population.
Face à une justice perçue comme faible et politisée, l’urgence est désormais de mettre fin aux pressions et de permettre un traitement équitable de l’affaire, dans l’intérêt de la nation et de son avenir démocratique.