Port-au-Prince, 6 février 2025 – Le débat sur la tenue des élections en Haïti en novembre 2025 divise profondément le Conseil présidentiel de transition (CPT) et le parti Fanmi Lavalas. Alors que Leslie Voltaire, président du CPT et représentant de Fanmi Lavalas au sein de l’instance, affirme que des élections peuvent se dérouler sur 80 % du territoire, son propre parti s’oppose fermement à cette idée, exigeant avant tout le rétablissement de la sécurité nationale.
Une fracture au sein du CPT
Dans une interview accordée à France 24, Leslie Voltaire a déclaré que seuls les départements de l’Ouest et de l’Artibonite étaient affectés par l’insécurité, ce qui permettrait d’organiser les élections dans les huit autres départements du pays. Il a ainsi réaffirmé la volonté du CPT de respecter son calendrier électoral en maintenant les scrutins pour novembre 2025.
Fanmi Lavalas, pour sa part, rejette catégoriquement cette approche et critique ouvertement l’idée d’organiser des élections sans avoir, au préalable, éradiqué l’insécurité généralisée qui gangrène le pays. Dans un communiqué publié le 2 février, le parti qualifie cette initiative de « mascarade politique » et met en garde contre des élections qui ne serviraient qu’à légitimer un processus « biaisé et corrompu ».
Un contexte sécuritaire préoccupant
L’opposition de Fanmi Lavalas repose sur une réalité alarmante : une insécurité grandissante qui affecte plusieurs régions du pays, en particulier la capitale et ses environs. Selon le parti, organiser des élections dans un pays où les gangs contrôlent des pans entiers du territoire est non seulement irréaliste, mais également dangereux.
« Tout citoyen a droit à une vie paisible chez lui, à la liberté de circulation, au droit de se nourrir, de recevoir des soins de santé et une éducation, ainsi qu’au droit d’empêcher que les gangs ne prennent totalement le pays », rappelle Fanmi Lavalas dans son communiqué.
Le parti insiste sur la nécessité de rétablir l’ordre avant toute consultation électorale et exhorte son représentant, Leslie Voltaire, à écouter la voix du peuple, qui, selon lui, exige la sécurité avant toute initiative politique.
Des tensions croissantes dans la capitale
Alors que ce désaccord politique s’intensifie, la situation sur le terrain continue de se détériorer. À Port-au-Prince, la population est sur le qui-vive face aux menaces de nouvelles attaques de groupes armés. Ce climat de peur a conduit plusieurs entreprises à fermer leurs portes, tandis que certaines écoles ont suspendu leurs cours par mesure de précaution.
Face à cette montée des tensions, Fanmi Lavalas réclame des moyens supplémentaires pour la Police nationale haïtienne afin de reprendre le contrôle des zones sous influence des gangs.
Quelle issue pour le processus électoral ?
Ce différend entre Fanmi Lavalas et son représentant au sein du CPT met en lumière les profondes divisions au sein du pouvoir de transition. D’un côté, Leslie Voltaire et une partie du CPT tentent de maintenir un calendrier électoral serré pour amorcer un retour à la normalité institutionnelle. De l’autre, Fanmi Lavalas et plusieurs acteurs politiques et sociaux estiment que la priorité doit être donnée à la sécurité avant d’envisager tout scrutin.
L’issue de ce bras de fer déterminera non seulement l’organisation des élections de novembre 2025, mais aussi la crédibilité du processus électoral dans un pays en proie à l’une des crises sécuritaires les plus graves de son histoire.