Le président argentin Javier Milei vient de franchir un cap controversé en autorisant la vente d’armes semi-automatiques aux civils, après avoir déjà abaissé l’âge légal de possession d’armes à 18 ans. Une décision qui divise et interroge sur les conséquences sécuritaires dans un pays déjà confronté à la violence urbaine.

Une révolution libertarienne qui fait polémique

Fidèle à sa philosophie ultra-libérale, Javier Milei ne se contente pas de déréguler l’économie argentine. Le président pousse maintenant sa logique jusqu’au marché des armes à feu. Ses récents décrets autorisent désormais les « utilisateurs légitimes » à acquérir des armes semi-automatiques de gros calibre, notamment des fusils d’assaut dérivés d’armes militaires.

Cette mesure marque une rupture historique : depuis 1995, ces armes de guerre étaient strictement réservées aux forces armées argentines. En parallèle, l’âge minimum pour posséder une arme a été abaissé de 21 à 18 ans fin 2024.

Pour les Haïtiens qui connaissent les ravages de la prolifération d’armes dans leur pays natal, cette évolution argentine résonne avec une inquiétante familiarité. Alors qu’Haïti peine à contrôler la circulation d’armes illégales qui alimentent les gangs, l’Argentine fait le choix inverse en facilitant l’accès légal aux armements lourds.

« Un État qui abdique ses responsabilités »

« Le gouvernement semble déléguer à chaque individu la responsabilité de garantir sa propre sécurité », s’alarme Julian Alfie, avocat du Réseau argentin pour le désarmement. Pour lui, cette approche traduit « une position idéologique extrême, qui va au-delà de l’idée d’un État minimal et semble s’approcher de celle d’un État inexistant. »

Cette critique fait écho aux préoccupations exprimées par de nombreux observateurs internationaux, notamment dans la diaspora haïtienne, qui ont vécu les conséquences dramatiques d’un État affaibli face à la prolifération d’armes.

Le paradoxe de Rosario : lutter contre le crime en armant les civils

L’incohérence de cette politique éclate au grand jour à Rosario, deuxième ville d’Argentine et théâtre d’une guerre des gangs sanglante. Ironiquement, cette ville sert de laboratoire à la politique anti-mafia du gouvernement Milei, tout en subissant les effets pervers de la libéralisation du marché des armes.

« L’année dernière, on a identifié de faux acheteurs qui se rendaient dans les armureries, achetaient des armes légalement et les détournaient quelques jours plus tard vers des organisations criminelles », révèle Julian Alfie. Un scénario qui rappelle tragiquement comment les armes légales finissent souvent entre de mauvaises mains.

Cette situation n’est pas sans rappeler les mécanismes qui alimentent l’insécurité en Haïti, où le détournement d’armes légales vers les groupes criminels constitue l’une des principales sources d’approvisionnement des gangs.

Une escalade qui inquiète

Si Javier Milei n’a pas encore légalisé le port d’arme généralisé, il s’était prononcé en sa faveur avant son élection en 2023. Cette perspective inquiète d’autant plus que l’Argentine traverse une crise économique majeure, terreau favorable aux tensions sociales.

Cette dérive argentine nous interpelle : dans un monde où l’insécurité grandit, la solution réside-t-elle vraiment dans l’armement généralisé des populations ? L’expérience haïtienne, malheureusement, nous enseigne le contraire. Reste à espérer que l’Argentine ne répétera pas les erreurs qui ont plongé d’autres nations dans le chaos sécuritaire.

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