Port-au-Prince, 17 avril 2025 – La grande mobilisation annoncée pour renverser les autorités de transition haïtiennes n’a pas eu lieu. Malgré les appels enflammés à un « Mercredi noir », la manifestation organisée par la brigade de vigilance de Canapé-Vert, soutenue par l’ex-officier Guy Philippe, a tourné court. Entre menaces, barricades et faible mobilisation, le mouvement a finalement été reporté, laissant transparaître une frustration grandissante dans la population.
Un échec cuisant pour les organisateurs
Prévue comme un soulèvement massif armé contre le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) et la Primature, la manifestation n’a rassemblé que quelques milliers de personnes, bien en deçà des attentes. Les organisateurs, qui comptaient marcher vers la Villa d’Accueil, ont finalement renoncé, invoquant des « menaces » et un risque d’affrontement avec les forces de l’ordre.
« On nous empêche de manifester, de crier notre peur et notre colère », déplore une manifestante croisée à Canapé-Vert. Dès l’aube, des barricades ont été érigées pour bloquer les accès, tandis que policiers et militaires se déployaient massivement autour des institutions gouvernementales. Samuel, chef de la brigade de Canapé-Vert, affirme avoir préféré « éviter un massacre », tout en promettant une prochaine mobilisation.
Une capitale sous tension
Malgré l’annulation officielle, plusieurs centaines de protestataires ont tout de même défilé dans les rues de Port-au-Prince, brandissant des machettes et dénonçant l’insécurité. « Ils sont bien protégés à la Villa d’Accueil, pendant que nous mourons chaque jour », lance un jeune homme en colère.
La tension a grimpé d’un cran en milieu de journée lorsque des barricades enflammées ont bloqué Delmas 32, un axe clé de la capitale, paralysant la circulation. Des civils armés, dont l’allégeance reste floue, ont également été aperçus au sein des manifestants, alimentant les craintes d’une escalade violente.
Un report, mais pas une défaite
Si la marche n’a pas atteint son objectif, les organisateurs assurent que la lutte continue. « Ce n’est que partie remise », prévient Samuel. Les habitants des quartiers touchés par les violences des gangs, comme Carrefour-Feuilles ou Turgeau, expriment un désespoir croissant. « On veut vivre, on veut respirer, on veut la paix », clame une jeune femme déplacée.
Dans un contexte où l’État peine à rétablir l’ordre, cette mobilisation avortée illustre à la fois la colère populaire et les divisions qui fragilisent toute tentative de mouvement unitaire. Les prochains jours diront si cette contestation saura se réorganiser – ou si elle restera un coup d’épée dans l’eau.