Arrêtée dimanche en République dominicaine alors qu’elle revenait du Canada, l’ancienne mairesse de l’Arcahaie Rosemila Petit-Frère a été remise mercredi aux autorités haïtiennes. Cette interpellation marque un tournant dans l’enquête sur les présumées affaires de blanchiment d’argent qui l’éclaboussent.
Le retour au pays ne s’est pas passé comme prévu pour Rosemila Petit-Frère. L’ancienne figure politique de l’Arcahaie, qui pensait peut-être pouvoir rentrer discrètement de son voyage au Canada, s’est retrouvée dans les filets de la justice dès son passage à Puerto Plata, dimanche 10 août.
Mercredi après-midi, la scène à la frontière haïtiano-dominicaine avait des airs de film policier : véhicule de l’immigration dominicaine, dispositif sécuritaire renforcé, transfert immédiat vers les autorités haïtiennes. Rosemila Petit-Frère découvrait brutalement que ses ennuis judiciaires l’avaient rattrapée.
Un parcours qui tourne au cauchemar judiciaire
Il y a encore quelques années, Rosemila Petit-Frère incarnait l’ascension politique locale. Mairesse de l’Arcahaie, cette commune stratégique de l’Ouest, elle jouissait d’une certaine influence dans la sphère politique haïtienne.
Mais les temps ont changé. Depuis que l’Unité centrale de renseignements financiers (UCREF) a pointé son nom dans une enquête sur le blanchiment d’avoirs, l’ancienne édile fait face à une tempête judiciaire qui ne cesse de s’amplifier.
Le rapport de l’UCREF, transmis au parquet de Port-au-Prince, a révélé des éléments troublants sur la gestion financière présumée de l’ex-mairesse. Des accusations graves qui ont transformé cette femme politique en fugitive recherchée par la justice.
Des indices troublants découverts lors de l’arrestation
Les détails de son arrestation en disent long sur la situation précaire dans laquelle se trouvait Rosemila Petit-Frère. Les autorités dominicaines l’ont trouvée en possession de « plusieurs copies de chèques d’un montant varié » – un élément qui risque d’alimenter davantage les soupçons qui pèsent sur elle.
Vêtue simplement d’un corsage, d’un jean bleu et de sandales noires, elle transportait deux valises contenant ses documents de voyage et d’autres effets personnels. Une image bien loin de l’ancienne mairesse qui paradait dans les cérémonies officielles.
Un système judiciaire sous pression
L’affaire Petit-Frère met également en lumière les défis auxquels fait face le système judiciaire haïtien. Le commissaire divisionnaire Jacques Antoine Étienne a dû justifier le transfert de la prévenue vers le Service départemental de la police judiciaire du Nord, faute de moyens logistiques suffisants dans le Nord-Est.
« Faute de moyens logistiques et en raison des travaux à notre direction départementale, elle a été transférée au SDPJ du Nord », a-t-il expliqué. Une situation qui illustre les difficultés chroniques de l’appareil judiciaire haïtien, souvent contraint de jongler avec des moyens insuffisants.
Un signal fort dans la lutte contre la corruption
Cette arrestation survient dans un contexte où la population haïtienne réclame plus de transparence et de reddition de comptes de la part de ses dirigeants. L’affaire Petit-Frère pourrait devenir un test décisif pour mesurer la détermination des autorités à s’attaquer réellement aux dossiers de corruption.
Pour de nombreux Haïtiens, tant au pays que dans la diaspora, cette interpellation représente un espoir : celui de voir enfin la justice faire son travail, peu importe le statut social ou politique des personnes impliquées.
Les prochaines étapes cruciales
Maintenant entre les mains de la police judiciaire, Rosemila Petit-Frère va devoir répondre des accusations qui pèsent contre elle. Les « copies de chèques » trouvées en sa possession lors de son arrestation seront certainement analysées de près par les enquêteurs.
L’ancien voyage au Canada qui devait peut-être lui permettre de souffler un peu s’est finalement transformé en piège. Car c’est bien à son retour que les autorités dominicaines l’attendaient, preuve d’une coopération judiciaire internationale qui fonctionne.
L’arrestation de Rosemila Petit-Frère marque peut-être un tournant dans la lutte contre la corruption en Haïti. Après des années de scandales financiers souvent restés impunis, cette affaire sera-t-elle celle qui démontrera que personne n’est au-dessus des lois ? Les Haïtiens, fatigués de voir leurs dirigeants s’enrichir impunément, attendent des réponses concrètes. L’ex-mairesse de l’Arcahaie va maintenant devoir rendre des comptes à la justice de son pays.