L’Organisation des États américains tire la sonnette d’alarme et se positionne désormais comme le principal coordinateur international pour sortir Haïti de la crise. Un changement de donne diplomatique majeur qui relègue la CARICOM au second plan.

Washington reprend la main sur le dossier haïtien

Fini le temps où la CARICOM menait seule la danse diplomatique autour d’Haïti. Dans un document stratégique récemment dévoilé, l’Organisation des États américains (OEA) ne mâche pas ses mots : le pays se dirige vers un « vide politique » une fois le mandat du Conseil présidentiel de transition (CPT) terminé le 7 février 2026.

Cette prise de position marque un tournant diplomatique significatif. Rappelons qu’sous l’administration d’Ariel Henry, c’était la CARICOM qui orchestrait les négociations politiques, aboutissant à la création du CPT en avril 2024. Mais l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche a redistribué les cartes. Le secrétaire d’État Marco Rubio a clairement demandé à l’OEA de prendre le leadership sur la crise haïtienne.

Un constat alarmant et réaliste

Dans son document intitulé « Haiti Strategic Roadmap for Coordinated International Support », l’OEA ne fait pas dans la langue de bois. L’organisation reconnaît implicitement que des élections crédibles ne pourront probablement pas se tenir avant l’échéance fatidique de février 2026.

« Cette crise potentielle, combinée aux graves défis sécuritaires, pourrait compromettre les progrès réalisés et affaiblir l’élan national et international », souligne le texte. Pour nos compatriotes qui suivent l’actualité depuis Port-au-Prince, Miami, Montréal ou Paris, ce constat résonne douloureusement : après tant d’efforts et de sacrifices, le spectre de l’instabilité continue de planer.

L’OEA, nouveau chef d’orchestre

Ce qui frappe dans cette nouvelle approche, c’est la volonté affichée de l’OEA de centraliser toute la coordination internationale. L’organisation ne se contente plus d’observer ou d’accompagner : elle entend diriger les opérations, avec l’ONU et la CARICOM comme partenaires secondaires.

Cette nouvelle configuration signifie concrètement que les décisions cruciales pour l’avenir d’Haïti se prendront désormais davantage à Washington D.C. qu’à Georgetown ou Kingston. Pour la diaspora haïtienne établie aux États-Unis, cette proximité géographique et politique pourrait représenter une opportunité d’influence accrue.

Des élections repoussées aux calendes grecques ?

Le document de l’OEA évoque bien la réforme du Conseil électoral provisoire (CEP), l’enregistrement biométrique des électeurs, et les campagnes d’éducation civique. Mais aucune date électorale concrète n’est avancée. Cette absence révèle une vérité que beaucoup d’Haïtiens soupçonnaient déjà : les élections promises ne sont pas pour demain.

Cette situation interpelle particulièrement nos concitoyens de la diaspora qui, malgré la distance, gardent espoir de participer un jour au processus démocratique de leur pays natal. Combien de temps encore devront-ils attendre ?

Un CPT de plus en plus contesté

Pendant ce temps, le Conseil présidentiel de transition fait face à des critiques croissantes. Inefficacité, manque de transparence, légitimité contestée : les reproches s’accumulent. Certains secteurs proposent de réduire le nombre de ses membres, d’autres suggèrent que la Cour de cassation reprenne la direction provisoire de l’État, conformément à la Constitution de 1987.

Cette nouvelle feuille de route de l’OEA, si elle est adoptée, deviendra la boussole de l’action internationale en Haïti. Mais au-delà des manœuvres diplomatiques, une question demeure : cette énième initiative internationale permettra-t-elle enfin de redonner la parole au peuple haïtien ? Nos compatriotes, qu’ils vivent à Pétion-Ville ou à Brooklyn, méritent mieux qu’un éternel report de leurs aspirations démocratiques.

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